Art moderne

XXE SIÈCLE

À Antibes, Miró en 12 jalons

Par Élodie Antoine · Le Journal des Arts

Le 4 septembre 2024 - 472 mots

ANTIBES

Le Musée Picasso présente 12 tableaux de l’artiste catalan, issus d’une collection privée, sous forme de minirétrospective.

Antibes. La Collection Nahmad est de retour au château Grimaldi. Après l’exposition « Collection Nahmad, dix chefs-d’œuvre » dédiée à Pablo Picasso en 2021, le Musée d’Antibes met à l’honneur les tableaux de Joan Miró (1893-1983) du galeriste et collectionneur monégasque d’origine syrienne.

Cause ou conséquence du nombre limité de prêts (12), Jean-Louis Andral, directeur du musée, a fait le choix de faire de chaque salle l’écrin d’une seule œuvre, parfois de deux.

Ce choix de douze œuvres clefs réalisées entre 1925 et 1968 permet de résumer la quête de toute une vie, selon un parcours non chronologique. Trois miniséries émergent tout particulièrement : les « Peintures de rêves » (1924-1927), les grandes peintures sur fond clair de 1945 et celles souvent monumentales de 1967-68.

L’exposition s’ouvre sur la fin des années soixante, période durant laquelle l’artiste se confronte à des formats de plus en plus vastes qui lui offrent une grande liberté gestuelle et créatrice. Miró évince alors tout signe, symbole et trace de signification au profit d’une réflexion sur l’espace et le vide. Dans les cinq peintures de 1967-68, le contraste des couleurs pures fait flotter les signes sur des fonds énigmatiques. Ces œuvres illustrent deux des thèmes de prédilection de Miró, l’oiseau et la nuit étoilée. La poésie des titres qu’il leur attribue (Oiseau éveillé par le cri aigu de l’azur s’envolant sur la plaine qui respire, 1968) incite le regardeur aussi bien à scruter l’apparition du volatile qu’à le perdre dans l’immensité du paysage. La figuration de l’espace cosmique, initiée par la série des « Constellations » en 1939, trouve ici une dimension inédite propice à la méditation, à la rêverie.

Ce sont les années surréalistes que l’exposition conduit ensuite à redécouvrir à travers la série des « Peintures de rêves ». Arrivé à Paris en 1920, Miró y rencontre Picasso et se lie d’amitié avec lui. Il rejoint, dès 1924, le groupe des surréalistes au contact desquels il développe une fascination pour les visions et les rêves. À propos de cette période, il déclarera plus tard : « En 1925, je dessinais presque entièrement d’après des hallucinations. » Il joue alors sur les formes et les signifiants comme en témoignent Peinture (Femme au chapeau rouge) et Peinture (Le Chat blanc) (1927).

La femme, thème si cher à Miró, est au centre des peintures de la dernière salle. Femme, étoiles (7 mai 1945), peinte le jour de la reddition allemande, met en scène des figures menaçantes. L’étoile bicolore (rouge et bleu) serait-elle la manifestation de ce monde fissuré en deux, issu de la guerre ? Cette dualité rappelle que le monde onirique de Miró est dialectique, empreint à la fois de rêverie et d’angoisse. L’exposition montre ainsi que le réel et l’imaginaire sont indissociables de la poétique de son langage plastique.

Joan Miró. Chefs-d’œuvre de la Collection Nahmad ,
jusqu’au 27 octobre 2024, Musée Picasso, Château Grimaldi, 06600 Antibes.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°638 du 6 septembre 2024, avec le titre suivant : À Antibes, Miró en 12 jalons

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