Tacita Dean entre en scène

Créé à Londres en décembre 2021 (année de la commémoration de l’anniversaire de la mort du poète), le Dante Project de Wayne McGregor, inspiré de la Divine Comédie, fait ainsi son entrée ce printemps au répertoire de l’Opéra national de Paris. Le chorégraphe a imaginé un spectacle en trois actes et a fait appel à Tacita Dean pour en concevoir les décors et les costumes. Le dessin, le film et la photographie argentique, autant dire des pratiques associées à la lenteur, sont les médiums de prédilection de l’artiste britannique, qui a eu recours à chacun d’eux et a travaillé en amont de la création du ballet et du livret.

Sa vision de l’enfer, un paysage de montagnes à l’envers, dessinées à la craie sur des photogravures, est glaciale et monochrome, tandis que pour évoquer le paradis, Tacita Dean, à travers un film 35 mm, embarque les spectateurs dans une expérience chromatique hypnotique, empruntant à la palette de « couleurs sales » de William Blake (d’après sa fameuse illustration du poème dantesque en 1824). Quant au purgatoire, état par définition transitoire, il est rendu par des tirages photographiques (en couleurs inversées) de négatifs, représentations de jacarandas rehaussées au crayon blanc.

Pour prolonger cette découverte esthétique – ou se consoler de ne pas y avoir assisté –, on retrouvera l’univers de Tacita Dean à la Bourse de commerce, qui lui dédie pour quelques semaines l’espace théâtral de sa Rotonde. Viendra s’y échouer, « comme un bateau ivre », un pavillon concave teinté d’ocre rouge témoignant de son « attirance pour les limites de la Terre – le désert comme la mer, la glace qui s’étend au bout du monde ou le volcan jailli de l’océan. »