Longtemps dénigré en France, l’artisanat d’art français reprend la main en se positionnant comme un métier de création à part entière. Le salon Révélations, au Grand Palais, est l’occasion de mesurer l’impact grandissant de ces savoir-faire dans la création contemporaine.
Avec un chiffre d’affaires de 8 milliards d’euros pour 38 000 entreprises, les métiers d’art, en France, ne connaissent pas la crise. Pourtant, en dépit de cette manne financière, le secteur a longtemps souffert d’un manque de considération face à l’art contemporain et au design, jugés artistiquement supérieurs. C’est pour lutter contre ces préjugés, et faire connaître leur créativité, que le syndicat Ateliers d’art de France a créé en 2013 Révélations, la première Biennale internationale des métiers d’art et création. Dans un lieu prestigieux, le Grand Palais, la foire accueille pour sa troisième édition, du 4 au 8 mai 2017, quatre cents exposants du monde entier, avec en invité d’honneur le Chili.
« Révélations a été décisif pour faire reconnaître la dimension artistique de notre métier », souligne Serge Nicole, président pendant dix ans des d’Ateliers d’art de France et à l’origine de la biennale. « Il y avait une grande curiosité de la part du public, et la première édition fut un gros succès. Les gens faisaient la queue du Grand Palais jusqu’aux Champs-Élysées », se souvient-il. Face à cet engouement, le syndicat de la profession obtient en 2014 la reconnaissance officielle des métiers d’art dans la loi artisanat, commerce et très petites entreprises en tant que secteur économique à part entière. Une victoire non seulement gratifiante sur le plan symbolique, mais aussi payante sur le plan financier, car « être perçu comme créateur est toujours très bénéfique pour le chiffre d’affaires », rappelle malicieusement Serge Nicole.
Le savoir-faire créatif
« La principale définition du métier d’art, c’est son dialogue avec la matière », martèle Aude Tahon, la nouvelle présidente du syndicat depuis 2016. Créatrice textile renommée – elle a remporté le grand prix de la création de la Ville de Paris en 2005 –, Aude Tahon a appris les techniques de tissage et de nœuds coréens auprès d’une authentique maître textile. Aujourd’hui, elle s’inspire de ce savoir-faire traditionnel pour créer des accessoires de mode et des objets de décoration d’une étonnante modernité. « Les créateurs asiatiques ont un savoir-faire exceptionnel, mais restent très fidèles à la tradition, soutient Serge Nicole. Ils admirent les créateurs français pour la liberté qu’ils insufflent à leur travail. »
À l’opposé des rivalités artistiques, l’artisanat d’art valorise la richesse culturelle d’un pays tout en favorisant le partage des connaissances. En témoigne cette année la découverte d’une technique ancestrale spécifique à un village de la Cordillère des Andes : le tissage de crin de cheval. À l’approche de Révélations, tout le village s’est mobilisé pour créer des œuvres de grand format et bénéficier de cette formidable ouverture sur l’international. Véritable vitrine artistique des savoir-faire du monde entier, la foire présente ainsi le meilleur de la création contemporaine à des prix oscillant entre 500 euros pour une petite céramique ou un bijou à 100 000 euros pour une pièce de mobilier.
Faire bouger les lignes
En parallèle des cent soixante stands de créateurs, l’exposition « Le Banquet » convie dans l’allée centrale une dizaine de pays, dont la Corée du Sud, la Suisse, la Russie, le Luxembourg, le Japon et la Chine, à présenter leurs pièces les plus spectaculaires. La sélection réalisée en partie par Odile Decq, architecte renommée, Antoine de Galbert, collectionneur et fondateur de La Maison rouge, et Adrien Gardère, designer, témoigne de l’intérêt grandissant des professionnels du monde de l’art pour les différentes facettes de ces savoir-faire.
Preuve que le secteur est florissant, la fondation LVMH vient parallèlement d’annoncer la future ouverture d’un centre culturel des métiers d’art et des savoir-faire français dans l’ancien Musée des arts et traditions populaires de Paris, tandis que le Palais de Tokyo renforce son partenariat avec la Fondation Bettencourt Schueller autour d’un cycle d’expositions mettant en lumière les collaborations entre artistes et artisans d’art.
Autrefois étanches, les frontières entre art contemporain, design et artisanat d’art s’élargissent pour répondre aux attentes d’un public désireux de « revenir à des choses plus personnelles face à l’uniformisation et la mondialisation de l’art », analyse Henri Jobbé-Duval, commissaire général de la foire. À cet égard, Révélations poursuit sa vocation « de supprimer les barrières dans le domaine de la création », souligne Aude Tahon, pour qui le partenariat inédit avec le festival de design D’ Days est une façon de « mettre en évidence ce qui unit nos forces pour les mettre au service de la création ».
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Révélations, du savoir-faire au faire savoir
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Abonnez-vous dès 1 €Du 4 au 8 mai 2017. Grand Palais, avenue Winston-Churchill, Paris-8e. Ouvert de 10 h à 20 h, 19 h le lundi. Tarifs : de 7 à 18 €. www.revelations-grandpalais.com
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°701 du 1 mai 2017, avec le titre suivant : Révélations, du savoir-faire au faire savoir