Mémoire photosensible

Dans le premier espace aux murs blancs, cinq photographies de bâtiments au cadrage rapproché issues de la série Lumière noire s’offrent au regard du visiteur. Plusieurs dessins réalisés de mémoire par Tadzio à partir de ces mêmes photos sont également exposés, mettant en regard deux perceptions et temporalités d’un même sujet. Ce corpus « photo-graphique » a été agrégé en un flux vidéo projeté dans le second espace obscur et parcouru d’étranges sonorités de Jérôme Combier, compositeur à l’Ircam, amplifiant la sensation d’espace tridimensionnel. Le photographe et le musicien ont conçu cette exposition à partir d’un protocole de travail commun durant deux ans. Les variations lumineuses des photographies et la musique évoluent selon les données exactes de la luminosité du jour et de l’heure de la prise de vue des photographies de la série Lumière noire, collectées par Tadzio. Ces changements de lumière appliqués à un même sujet dont l’angle de vue est légèrement déplacé n’est pas sans rappeler l’approche impressionniste et notamment la série des cathédrales de Rouen peintes en 1892 par Claude Monet. Avec les technologies actuelles, l’impression rétinienne laisse place à des calculs informatisés permettant à Jérôme Combier de composer la musique à partir de ces mêmes données, glissandos et fréquences sonores suivent ainsi les courbes lumineuses de la prise de vue. « Le mouvement de l’image donne une temporalité qui justifie la place de la musique », explique Tadzio. Ce processus collaboratif mêlant images et sons rend impossible toute dissociation temporelle et fait de l’exposition « Hippocampe » une œuvre à part entière, évocation d’impressions révolues qui s’apprécient dans l’instant.