Associé à la Tate Modern de Londres, le Centre Pompidou présente une rétrospective Franz West. L’occasion de replonger dans le travail de cet artiste viennois tardivement reconnu au-delà de l’Autriche et dont l’œuvre s’étend sur plus d’une quarantaine d’années.
Des années 1970 à sa mort en 2012, Franz West développe une création qui est aujourd’hui perçue comme majeure sur la scène internationale, car représentative des paradigmes de l’art contemporain : esthétique participative, ouverture au langage et à la performance, sens de la provocation, goût postmoderne de la citation et de l’éclectisme. L’esthétique participative et interactive caractérise le travail de Franz West dont l’œuvre tente de créer un rapport au spectateur. D’abord dans les Passstücke (dès 1973-1974), sculptures en plâtre blanc mettant en relation l’œuvre au corps, sortes de prothèses amovibles destinées à être manipulées : affirmant le lien du corps à l’inconscient, ces œuvres sont comme des révélateurs d’états psychiques selon la manière dont elles sont activées. De même, pour l’artiste, les multiples installations, par la présence de divans et de fauteuils, sont une invitation à s’asseoir, se contempler ou boire un verre. Toutes ces réalisations visent à susciter chez le spectateur plaisirs visuel, sensoriel et sensuel. La provocation est permanente dans la démarche de Franz West, souvent à caractère érotique, teintée d’humour potache ou sarcastique. Cette dimension s’affirme dans les dessins, à travers lesquels l’artiste fait souvent jouer mots et images. Des premiers dessins au stylo bleu sur papier ou au graphite et des gouaches réalisées dans un style Jugendstil (influencé par Gustave Klimt) aux collages et dessins de la fin des années 1970, ses réalisations ne prétendent pas à une renversante force plastique mais sont plutôt à voir comme des jeux, parfois grotesques, à caractère humoristique et érotique. C’est un même esprit provocateur qui traverse les performances et les vidéos de l’artiste, tout comme ses sculptures en papier mâché à l’allure croûteuse qui privilégient le trivial, le sale, le brinquebalant et le mauvais goût dans un souci de rejeter toute forme de perfection ou de beauté.
Artiste cultivé et irrévérencieux, Franz West s’est nourri de multiples sources, jouant d’une pratique éclectique et volontiers citationnelle. L’œuvre est ainsi parcourue d’emprunts à la culture populaire (comme la bande dessinée, les publicités ou les revues pornographiques) et ne cesse de se référer à divers domaines plus pointus (philosophie, psychanalyse, musique). Parmi ses citations à l’art, Franz West s’amuse parfois à critiquer l’art moderne dans des dessins parodiques, de Duchamp à l’actionnisme viennois dont il rejette le pathos et la dimension christique. Désireux d’ouvrir les frontières entre sa pratique et celle des autres, Franz West fait aussi appel à de nombreux artistes et musiciens pour réaliser des projets. L’artiste collectionne par ailleurs des œuvres qu’il lui arrive de réutiliser dans des installations (Viennoiserie, 1998). Cet art du détournement, Franz West se l’applique à lui-même en pratiquant l’autocitation : il en est ainsi des photographies des années 1970 qu’il réutilise dans des affiches peintes plus récentes. Un goût du détournement qui toujours se teinte de légèreté et d’humour.
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Les provocations de Franz West
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°717 du 1 novembre 2018, avec le titre suivant : Les provocations de Franz West