ARLES
Après le Japon et la Corée du Sud, c’est dans la cité provençale que l’artiste coréen a inauguré son troisième lieu d’exposition. Une architecture tout en minimalisme et en élégance accordée à ses œuvres.
Arles (Bouches-du-Rhône). À Arles, la « fondation » Lee Ufan commençait à devenir une… arlésienne. Imaginé en 2016 et lancé en 2017 avec l’acquisition, suivie de travaux, par l’artiste d’un ancien hôtel particulier construit au XVIIe siècle, le projet a tardé en effet à voir le jour, principalement pour cause de Covid. C’est dorénavant chose faite et le « Lee Ufan Arles », qu’on appelle à tort « fondation » puisqu’il s’agit d’un fonds de dotation (un statut moins contraignant), a été inaugurée le 15 avril. Il occupe les quelque 1 350 mètres carrés répartis sur trois étages de l’hôtel Vernon, en plein centre-ville, à deux pas de la place du Forum.
Le bâtiment a été entièrement réaménagé par l’architecte japonais Tadao Ando, grand ami de Lee Ufan et déjà maître d’œuvre du Lee Ufan Museum qui lui est consacré depuis 2010 sur l’île de Naoshima au Japon et, depuis 2015, de l’Espace portant son nom au sein du Busan Museum of Art en Corée du Sud.
À Arles, Ando a posé dès la première salle sa marque de fabrique, à savoir des plaques grises en béton armé (ici disposées en spirale avec en leur centre une projection au sol de Lee Ufan), béton parsemé de trous pour un minimalisme et une sobriété exemplaires. L’accueil et la boutique, confiés à la designer Constance Guisset, s’inscrivent dans ce cadre de simplicité et d’élégance.
Pour ce très bel écrin, Lee Ufan a opéré lui-même la sélection de la soixantaine d’œuvres présentées. Consacré à la sculpture et aux installations, le rez-de-chaussée décline les différentes formes de cette pratique qui, chez Lee Ufan, met en relation, en résonance, en correspondance des objets entre eux ainsi que ces mêmes objets avec leur environnement, ici une pierre et une plaque de tôle, là une pierre et une plaque de verre, ailleurs une pierre encore et une barre de métal. Autrement dit un pont entre le fait et le non-fait, le lisse et le rugueux, l’industriel et le minéral…
Le premier étage est, lui, entièrement dévolu, de façon chronologique, à la peinture et au dessin – sous la forme d’un cabinet. De salle en salle, le visiteur découvre les premiers tableaux aux lignes bleues, puis quatre toiles de la période des « Vents », et enfin ses dernières toiles marquées par un retour à la couleur. Chaque période, qui confirme le rôle du corps, de la main et de la respiration, est représentée par quatre ou cinq œuvres, ce qui rend le parcours très agréable, à échelle humaine. Enfin, le troisième étage, baptisé « espace Ma », est destiné à des expositions temporaires et résidences d’artistes pour faire de cette adresse non un mausolée mais un lieu vivant.
Alors pourquoi Arles ? Parce que les liens entre l’artiste (né en 1936) et la France datent de plus de cinquante ans et précisément de 1971, lorsque Lee Ufan participe à la Biennale de Paris. Il dispose en outre depuis 1995 d’un atelier près de la place Pigalle où il vit une partie de l’année. Et parce qu’en découvrant Arles à l’occasion de la parution de sa monographie en 2012 (éditions Actes Sud) et de son exposition à la chapelle du Méjan en 2013, il a été « fasciné par les ciels et par la présence de l’art et de l’histoire dans cette cité romaine ». Et donc par les notions de lumière, de strates et de temps, maître mot pour ce dernier de toute son œuvre, que cette nouvelle adresse conjugue à tous les modes : le temps de la pierre, le temps du fer, le temps du repérage, le temps du faire, le temps du regard, le temps présent et le temps d’après. Le temps, pour reprendre le titre de son exposition au Centre Pompidou-Metz en 2019, d’« Habiter le temps ». Et de le prendre.
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Lee Ufan ouvre sa « fondation » à Arles
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°589 du 13 mai 2022, avec le titre suivant : Lee Ufan ouvre sa « fondation » à Arles