Le Lion d’or à la performance d’Anne Imhof

Dès l’ouverture des Giardini, les visiteurs se pressent en masse pour la voir, quitte à faire parfois une heure de queue, et ça ne désemplit pas tout au long de la journée. Anne Imhof est tout à la fois artiste plasticienne et chorégraphe, à la tête d’une bande de jeunes vêtus de jeans, de survêtements et de sweats à cagoule, aux visages fortement marqués, aux allures de junkies et de voyous, qui jouent de leurs corps en toute puissance d’expression nerveuse, voire de douce violence. Ajoutée à cela, une paire de dobermans qui participent à excéder la mesure de tension de la prestation de l’artiste. Anne Imhof a créé pour l’occasion une scénographie de structure vitrée et grillagée qui modifie complètement l’espace du pavillon allemand et qui joue de la relation entre le dehors et le dedans. Le spectateur est invité à y pénétrer sur son flanc, franchissant un rideau métallique bruyant, et se retrouve à circuler sur un plateau de dalles transparentes à un mètre du sol. Suivant une chorégraphie réglée au fil du rasoir, toute la bande de l’artiste opère ici et là, individuellement ou en petits groupes, en se déplaçant parmi les visiteurs, en passant d’un espace à l’autre, en rampant sous les éléments vitrés, en grimpant jusque sur le toit du bâtiment, le tout sur un fond sonore alternant silence et extrême présence. Il y va d’une occupation de l’espace tous azimuts et sans répit, sur un mode chorégraphique existentiel qui semble issu de la leçon de Pina Bausch. En plus dur, en plus engagé, en plus risqué.