Profession - Services

Assureur d’art

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 21 octobre 2005 - 743 mots

Trouver la meilleure solution pour protéger les œuvres des collectionneurs privés ou des professionnels : telle est la mission de ces assureurs « sur mesure ».

Discrétion, efficacité, connaissance du monde de l’assurance conjuguée à des accointances très prononcées avec le milieu de l’art, telles sont les qualités indispensables aux aspirants assureurs d’art. Les professionnels ne sont ici pas légion : moins de dix spécialistes, compagnies et courtiers confondus, sont recensés à Paris ; la plupart avouent par ailleurs être issus à la fois d’une famille d’assureurs et de collectionneurs. D’après Alain Gilbert, directeur d’AXA Art, le métier serait à l’image de l’inventeur des contrats spécifiques aux œuvres d’art : expert en tableaux contemporains et assureur, celui-ci aurait souhaité tout simplement réunir ses deux métiers en un seul. N’importe quel amateur ou historien de l’art ne pourra toutefois pas s’engager dans cette voie. « L’essentiel est d’avoir une formation d’assureur, précise Richard de La Baume, courtier spécialisé à Paris et lui-même fils d’assureurs collectionneurs. Le fait d’être amateur d’art est plutôt la cerise sur le gâteau ». Un point de vue que nuance le courtier Lucien-François Bernard, responsable de LDA Artscope, la divison art du groupe Aon : « La technique de l’asurance d’objets d’art est très simple. En revanche, faire partie du sérail est primordial pour gagner une crédibilité. » Judith Goldnadel, responsable de la filiale Art chez Siaci, un autre courtier de la place de Paris, a quant à elle suivi un parcours juridique complété par deux années à l’École du Louvre. « Il faut aimer les œuvres d’art, confie-t-elle, car on baigne dans un milieu de professionnels, mais c’est sûrement le plus agréable des métiers de l’assurance. »
En règle générale, l’assureur n’assume pas le rôle d’expert. « Ce n’est pas à moi de décréter la valeur d’une œuvre », renchérit Richard de La Baume, qui fait appel, comme tous les courtiers, à des experts professionnels agréés par les compagnies d’assurances. L’estimation des objets à assurer est en effet essentielle pour les contrats à valeur agréée, c’est-à-dire dans lesquels le montant porté au contrat est incontestable – contrairement aux multirisques où c’est au client d’en apporter la preuve. La seule facture demeure souvent une garantie insuffisante, le marché du faux étant encore prospère. Dans ce domaine, AXA Art, qui dispose de son propre corps d’inspecteurs chargés de vérifier les mises en protection et la valeur, fait figure d’exception, puisque la Lloyd’s de Londres elle-même n’emploie pas de collaborateurs responsables des expertises. Ces « délégués artistiques » ont un profil atypique dans le métier de l’assurance. Historiens de l’art de formation, ils ont été initiés à l’assurance par la compagnie, « ce qui est plus simple que l’inverse », note Alain Gilbert. Au nombre de six, ils effectuent les visites de risques et réalisent des expertises, réajustées tous les deux ans en fonction de la cote du marché ; ils ont aussi « une obligation de résultat vis-à-vis des clients ». Culture du secret et faiblesse du turn-over font toutefois encore partie des us et coutumes. Le secteur n’est donc pas un gros pourvoyeur d’emplois: « Je reçois deux CV par semaine de gens très brillants à qui je ne peux pas donner satisfaction », déplore Lucien François Bernard, pour qui « le vrai concurrent est davantage la non-assurance » que ses confrères. Le volume d’activité est en effet très étroitement lié aux bons vouloirs de l’administration fiscale. L’obligation de déclaration des contrats d’assurances supérieurs à 15 000 euros a aisi fait renoncer de nombreux collectionneurs à s’assurer. Cette dernière ayant été supprimée en mars 2004, une reprise des activités est à présager, même si, pour Judith Goldnadel, « la méfiance demeure ». Les courtiers spécialisés ne se cantonnent donc pas à cette « niche », leur clientèle de collectionneurs ayant d’autres besoins en assurances. « Mieux vaut être marchand pour s’enrichir, conseille donc Richard de La Baume. Assureur d’art ou de risques pétroliers, on ne gagne bien sa vie que si on a beaucoup de clients… »

Formations

Un cursus juridique (spécialisations en droit des assurances à partir du master à l’Université) ou une formation spécifique aux métiers de l’assurance est indispensable, et peut être complété par une formation en histoire de l’art à l’Université ou à l’École du Louvre (www.ecoledulouvre.fr). - École nationale d’assurance, 8, rue Chaptal, 75009 Paris ; tél. 01 44 63 58 00 ; www.enass-aea.or : formations aux différents métiers de l’assurance à partir du baccalauréat.

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°223 du 21 octobre 2005, avec le titre suivant : Assureur d’art

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