Unesco

CONVENTION DE LA HAYE

Trois mesures de l’Unesco pour mieux protéger le patrimoine en zone de guerre

Par Olympe Lemut · Le Journal des Arts

Le 3 juin 2024 - 451 mots

L’agence de l’ONU veut former les militaires et les juges, notamment sur le recours au numérique.

La ville de Sanaa au Yemen est classé depuis 2015 sur la liste du patrimoine mondial en péril de l'Unesco, suite au bombardement du site par l'armée saoudienne. © Rod Waddington, 2013, CC BY-SA 2.0
La ville de Sanaa au Yemen est classé depuis 2015 sur la liste du patrimoine mondial en péril de l'Unesco, suite au bombardement du site par l'armée saoudienne.
© Rod Waddington, 2013

Dans les récents conflits, la convention de La Haye a parfois montré ses limites face à l’ampleur des destructions de biens culturels. Les mesures mises en place par l’Unesco depuis plusieurs années contribuent d’une certaine manière à protéger le patrimoine et à faciliter sa restauration après les conflits, mais comme le rappelle Audrey Azoulay, directrice générale de l’Unesco, ces mesures sont « mises en œuvre par temps de paix ». Géolocalisation de sites archéologiques et patrimoniaux, inventaire des collections muséales, envoi de matériel de protection dans les musées bombardés, numérisation de collections : certaines de ces actions doivent désormais être réalisées pendant les conflits, une nouveauté pour l’Unesco.

Parmi les nouvelles mesures, les formations destinées aux professionnels sont jugées prioritaires, en particulier pour les armées, et l’Unesco annonce avoir déjà formé « 7 500 militaires dans 169 pays » sur cinq ans. Cet aspect se voit renforcé d’une proposition d’alliance « civilo-militaire pour la protection des biens culturels », afin de former des unités mixtes spécialistes des questions de patrimoine : l’Unesco précise que ces unités seront formées prioritairement en Afrique.

Une autre initiative concerne la formation des juges et procureurs sur les destructions de biens culturels (collecte de données et méthodes d’enquête). Il est en effet difficile d’obtenir des données vérifiées sur les destructions de sites patrimoniaux, comme le montrait en février dernier la liste des sites détruits en Ukraine publiée par l’Unesco : seules les destructions avérées par l’imagerie satellite étaient citées, là où les autorités ukrainiennes recensaient des destructions bien plus nombreuses d’après des témoins oculaires. La condamnation en 2016 par la Cour pénale internationale d’un djihadiste pour la destruction des mausolées de Tombouctou en 2012 a constitué un jalon pour la protection des biens culturels, et l’Unesco déclare vouloir « renforcer les mécanismes juridiques de protection des biens culturels » dans l’hypothèse de poursuites en justice.

La dernière initiative concerne l’usage des technologies numériques par les professionnels du patrimoine et les militaires en zone de guerre, comme le repérage par « imagerie satellite », « la numérisation préventive de biens culturels » et les apports de l’I.A. dans ces domaines. Si la convention de 1954 (avec ses deux protocoles) fournit un cadre juridique solide pour la protection du patrimoine pendant les conflits, sa mise en œuvre dépend du bon vouloir des États. Parmi les États parties à la convention se trouvent en effet la Russie qui bombarde sans relâche des sites patrimoniaux en Ukraine (Odessa, Lviv, Kharkiv) et l’Arabie saoudite qui bombarde depuis 2015 des sites classés au Yémen (vieille ville de Sanaa) : mieux former les armées est une initiative utile mais poursuivre systématiquement les responsables de destructions du patrimoine le serait tout autant.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°634 du 24 mai 2024, avec le titre suivant : Trois mesures de l’Unesco pour mieux protéger le patrimoine en zone de guerre

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