Lauréat malheureux du projet pour le réaménagement du ministère de la Culture, aujourd’hui stoppé faute de financements, Francis Soler livre dans la ZAC Seine Rive Gauche un bâtiment de logements original et dynamisant, qui rompt avec le conformisme néo-moderne en vigueur dans le reste du quartier.
PARIS. Il fallait oser. Telle est bien la première pensée qui vient à l’esprit quand on découvre le bâtiment de logements récemment livré par Francis Soler dans la ZAC Seine Rive Gauche pour le compte de la Régie immobillière de la Ville de Paris. La surprise est de taille : bordant, dans la rue Émile-Durkheim, le côté est de la Bibliothèque nationale de France, les longues et hautes façades entièrement serties de panneaux vitrés déroulent sur toute la périphérie du bâtiment une immense fresque colorée. Celle-ci, imprimée en sérigraphie sur le verre, est une interprétation d’une autre fresque, le Repas des dieux olympiens, dont l’architecte maniériste du XVIe siècle italien Giulio Romano orna son célèbre Palais du Té à Mantoue. La reproduction n’est pas littérale mais, inspirée par le travail du graphiste Roman Cieslewicz, fragmentée et kaléidoscopique. Visible de l’extérieur, elle est aussi très présente à l’intérieur des logements, irisant les espaces de reflets colorés. Pourtant, derrière la littéralité un peu criarde de cette image appliquée en façade, le projet recèle une véritable intelligence de situation et donne, vis-à-vis du reste des constructions de la ZAC, quelques vraies leçons d’architecture urbaine. À l’extérieur, protégeant la fresque, la superposition régulière des balcons agrémentés de garde-corps constitués de lisses horizontales ainsi que les fins câbles verticaux des stores de protection rappellent, avec une efficacité que les prescriptions architecturales pléthoriques de la ZAC ne savent obtenir, le chatoiement cinétique des alignements parisiens. Par ailleurs, la conception structurelle du bâtiment, construit comme un parking sur pilotis avec des plateaux libres, permet l’aménagement de logements variés mais, surtout, la reconversion dans le temps de tout ou partie des surfaces. L’ensemble renoue paradoxalement avec l’époque où architecture et iconographie, rationnalité et figuration, arts majeurs et arts "décoratifs" se complétaient pour donner au vocabulaire classique une richesse qui créait la magnificence urbaine. En réinterprétant cette tradition de manière indubitablement contemporaine, Francis Soler aura réussi l’un des plus surprenants bâtiments parisiens de ces dernières années. Il aura fallu pour cela, notons-le au passage, qu’il déroge systématiquement au cahier des prescriptions architecturales de la ZAC Seine Rive Gauche.
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À Seine Rive Gauche, Soler persiste et signe...
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°36 du 18 avril 1997, avec le titre suivant : À Seine Rive Gauche, Soler persiste et signe...