Numérique - Comment favoriser l’accès de tous à la culture, y compris dans les « territoires » qui en sont le plus éloignés ? À cette vieille question, la part croissante du numérique dans les pratiques culturelles des Français, à commencer par les plus jeunes, suggère des réponses nouvelles.
En France, elle inspire à l’État une politique dont témoignent les deux dispositifs phares de ce quinquennat : le Pass culture et les Micro-Folies. Le premier se veut le point d’orgue d’une éducation artistique et culturelle en voie de généralisation. Il propose d’allouer pour deux ans à tous les jeunes de 18 ans une somme de 500 euros, à dépenser en biens culturels physiques (livres, instruments de musique…), numériques (abonnements presse, films, applications…) et présentiels (spectacles, concerts…). Le dispositif en cours d’expérimentation repose sur une application, qui géolocalise tous les points de vente, sites et événements situés à proximité de son bénéficiaire. Quant aux Micro-Folies, elles offrent un relais local à douze établissements culturels partenaires, parmi lesquels le Louvre, Orsay, Versailles ou la Philharmonie de Paris. Imaginés par Didier Fusillier sur le modèle des folies de La Villette et expérimentés à Sevran (93) dès 2017, ces espaces culturels de proximité sont des « tiers lieux » à mi-chemin entre le café, le fablab, la ludothèque, la salle de spectacle et la MJC. Elles se veulent aussi un « musée numérique » dont les visiteurs peuvent découvrir via un système de tablettes et d’écrans certaines des œuvres figurant dans les collections ou la programmation des institutions partenaires. Objectif affiché : lever les freins culturels à la fréquentation des musées en familiarisant le public avec leur offre. En 2019, Franck Riester annonçait le déploiement massif des Micro-Folies en France et à l’étranger, via la création de 1 000 d’entre elles d’ici à 2022, principalement dans les quartiers relevant de la politique de la ville et les villes petites et moyennes bénéficiaires du programme « Action cœur de ville ». Dotés de conséquents budgets (49 millions prévus en 2020 pour le premier, 3 millions pour le second), les deux dispositifs se veulent des « outils » décentralisés, et optent pour la proximité et la mise en réseau. Ils se fondent aussi sur un présupposé selon lequel le numérique serait une passerelle vers la culture légitime, telle qu’elle se conçoit et se diffuse dans les grandes institutions. Qu’il soit un remarquable outil de démocratisation culturelle n’est guère douteux. Mais encore faut-il pour cela qu’il soit accessible. Or c’est précisément sur ce point qu’achoppent les politiques publiques. En effet, les territoires les plus éloignés de la culture sont souvent ceux qui se heurtent à la « fracture numérique », que ce soit faute d’infrastructures ou d’équipements. Certains d’entre eux, et tout particulièrement les territoires ruraux, sont aussi notoirement sous-équipés en matière d’offre de transports, ce qui rend hasardeux un quelconque effet tremplin. Aussi ambitieuse soit-elle, la portée de cette politique culturelle dépend prosaïquement de la longueur des câbles et de la qualité des réseaux. Vaste chantier.
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Politiques culturelles et longueur de câbles
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°736 du 1 septembre 2020, avec le titre suivant : Politiques culturelles et longueur de câbles