LYON
La Ville a revu son plan de gestion lié à son classement « Unesco » pour l’adapter à l’augmentation de la température en été.
Lyon (Rhône). Sur les pentes de la Croix-Rousse, dans les immeubles haussmanniens de la Presqu’île ou dans le Vieux Lyon de la Renaissance, les étés deviennent chaque année un peu plus éprouvants pour les habitants du centre-ville lyonnais. Ces trois quartiers qui composent le site historique de Lyon, inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) en 1998, doivent urgemment s’adapter à des climats futurs qui ressembleront bientôt à ceux du Sud de l’Espagne. À l’occasion de la révision du plan de gestion « Unesco » du bien, mené par la Ville et l’État et dévoilé en juin, Lyon se dote d’un cap pour faire entrer son patrimoine deux fois millénaire dans une ère plus chaude.
Car si l’on parle habituellement de « confort d’été » pour évoquer les performances d’isolation du bâti face aux grosses chaleurs, Sylvain Godinot, adjoint au maire (EELV) chargé du patrimoine, parle lui d’une « question de santé » : « Lorsqu’on a des nuits à plus de 25 degrés, on n’est plus sur un enjeu de confort, mais sur un problème sanitaire. Le plan de gestion doit permettre de trouver des solutions, avec les professionnels du patrimoine et les énergéticiens. » L’habitabilité du centre-ville devient ainsi l’un des fils conducteurs du Plan de gestion 2024-2030.
Sur les bords de la Saône et du Rhône, le réchauffement du climat engendre déjà des comportements mettant en tension la protection du patrimoine : « Notre service urbanisme constate une explosion de la demande d’installation de climatiseurs, rapporte l’adjoint au patrimoine. Même s’ils sont installés sur les toitures, ils sont visibles depuis les collines. Dans les cours intérieures, souvent traboulées, il y a aussi une valeur patrimoniale. Et personne n’a les moyens de contrôler la réglementation : pour dix demandes au service d’urbanisme refusées, il y a neuf installations sauvages... »
Pour répondre à ce défi, la Ville et les services de l’État envisagent une planification urbaine jouant sur plusieurs paramètres : la réduction du trafic automobile, déjà engagée par la mairie écologiste, ou la végétalisation du cœur de Lyon, qui nécessite la révision de quelques préconceptions patrimoniales sur la minéralité urbaine. De grands chantiers engagés par la métropole de Lyon, comme le projet « Presqu’île à vivre » visant à piétonniser et végétaliser une large portion du quartier, vont déjà dans ce sens.
Les études menées dans le cadre de ce nouveau plan de gestion encouragent également de valoriser les qualités intrinsèques du bâti patrimonial, en termes d’inertie énergétique, d’exposition ou d’emplacement près des cours d’eau. Les fameuses traboules lyonnaises constituent elles aussi un atout, favorisant la circulation de l’air au cœur des îlots… quand elles ne sont pas envahies par les climatiseurs. Saturés de pompes à chaleur et de clims, « les espaces ne jouent plus leur rôle de régulateur de courants d’air, leurs capacités de perméabilité sont réduites », peut-on lire dans ce plan de gestion. Ces solutions passives seules ne suffiront d’ailleurs pas à offrir une ville habitable avec les températures de 2040 : une réflexion est ainsi amorcée autour d’un réseau de froid urbain, qui existe déjà du côté de la Part-Dieu. Des travaux lourds et complexes qui offriraient toutefois une solution pérenne.
La mise en place d’un nouveau site patrimonial remarquable (SPR) devrait également donner un cadre aux objectifs croisés de préservation du patrimoine et d’habitabilité du centre urbain. Dans un travail préparatoire conjoint avec la Métropole et la direction régionale des Affaires culturelles (DRAC), la ville a retenu le scénario d’une extension du SPR actuel, qui ne couvre que le quartier renaissance du Vieux Lyon, pour englober une bonne partie de la Presqu’île. « Nous allons finir les études préalables sur ce mandat, indique Sylvain Godinot, pour une entrée en vigueur d’ici à 2032. Dans le bilan rendu à l’Unesco, on constate que le patrimoine a bien été préservé grâce au premier plan de gestion. L’enjeu n’est pas tellement de mieux protéger, mais d’avoir des règles plus claires, et de simplifier la tâche des architectes des bâtiments de France et des urbanistes. »
Sur le plan patrimonial, le plan de gestion propose deux actions pour renforcer la prise en considération de deux périodes constitutives du bien Unesco : le patrimoine archéologique antique, avec un large programme de valorisation et d’études des sites, et le bâti XIXe-XXe, à travers une étude de recensement et une réflexion sur sa réhabilitation. « Dans cette valorisation, on veut s’adresser avant tout aux habitants du territoire », précise l’adjoint au maire. Le plan de gestion « Unesco » comme le futur SPR répondent bien à un objectif politique fort de la ville, le maintien des habitants et des activités au sein du centre-ville. Le même, finalement, qui avait conduit à la mobilisation contre la destruction programmée du Vieux Lyon dans les années 1960, et à la création du tout premier secteur sauvegardé français.
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Lyon, au défi du réchauffement climatique
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°640 du 4 octobre 2024, avec le titre suivant : Lyon, au défi du réchauffement climatique