Libeskind reconstruira le World Trade Center

Le Journal des Arts

Le 7 mars 2003 - 536 mots

Un an et demi après les attaques du 11 Septembre 2001, Daniel Libeskind vient d’être choisi pour redonner vie au World Trade Center. L’architecte a su convaincre les habitants de Manhattan avec son projet qui conjugue mémoire et espoir.

NEW YORK - Le vainqueur du concours international d’architecture du nouveau World Trade Center, Daniel Libeskind, confirme son aura d’architecte de la mémoire. L’équipe concurrente, THINK, faisait presque de la figuration face à l’auteur du Musée juif de Berlin. À cinquante-six ans, l’architecte américain d’origine polonaise est connu pour ses discours théoriques et son arrivée tardive dans le métier. Sa vision pour la renaissance du sud de Manhattan a su rassembler et toucher les esprits grâce à un symbolisme puissant : six tours de verre et d’acier surmontées d’une flèche haute de 541 mètres – ou 1776 pieds, en référence à l’année de la déclaration d’Indépendance du pays – s’articulent autour du seul vestige de Ground Zero, une large fosse bordée du mur de soutènement qui l’isole des eaux souterraines de l’Hudson. Ce parc, situé en sous-sol et entouré d’un musée dédié à la catastrophe, d’un centre de congrès et d’un hôtel de luxe, accueillera un monument en l’honneur des victimes, nouvelle occasion d’un concours international dont le lauréat sera annoncé le 11 septembre 2003. L’aménagement sous-terrain prévoit également un accès généralisé aux transports en commun. Outre le jardin suspendu et le restaurant panoramique au 110e étage, Daniel Libeskind a conçu deux larges espaces publics que le soleil illuminera, sans interruption, chaque 11 septembre entre 8 h 46 et 10 h 28.

Un équilibre délicat
L’architecte affirme ne pas avoir dû choisir entre le devoir de mémoire et les impératifs économiques, même si sa mission était de réhabiliter un kilomètre carré d’espace commercial. “C’est un équilibre délicat, explique-t-il. Au début, les uns disaient : Ne construisez rien à cet endroit, car c’est un lieu de tragédie, des gens sont morts ici. Les autres répondaient : Construisez en défi au terrorisme ; construisez plus haut ; ne faites pas mention de l’horreur. Ces avis contraires devaient être combinés en un seul et même espace qui prenne en compte l’histoire et la mémoire des victimes, mais qui ouvre également la ville vers le futur.”
Un bâtiment sans précédent pour un évènement sans précédent ? Pas vraiment. Pour modèle, Daniel Libeskind propose sa construction berlinoise. “[New York] est un lieu unique au monde, mais mon expérience du Musée juif de Berlin me laisse entrevoir une analogie. Avec ce musée, j’ai traité le génocide des juifs. Mais ce lieu est plein d’espoir, de vie, et démontre que la culture juive n’a pas été anéantie et continue à avoir un futur [...]. New York n’est pas une simple tabula rasa laissant le champ libre à des mégastructures fantasques. Elle fait partie de l’Histoire.” Si la zone entourant le World Trade Center a récemment pris le visage d’un musée d’histoire en plein air, Daniel Libeskind, le mémorialiste chevronné, ne craint pas la commémoration à outrance à Manhattan : “C’est un jour qui a changé le monde.”
Avec un coût s’élevant à 350 millions de dollars (325 millions d’euros), la date du début des travaux reste incertaine, tout comme les origines du financement du projet.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°166 du 7 mars 2003, avec le titre suivant : Libeskind reconstruira le World Trade Center

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