Le Haut Conseil de l’éducation artistique et culturelle a remis son premier rapport annuel. Un texte sans réelle consistance malgré l’urgence des besoins.
PARIS - Créé par le ministère de la Culture à l’automne 2005 (en remplacement de l’ancien Haut Comité des enseignements artistiques), le Haut Conseil de l’éducation artistique et culturelle vient de rendre son premier rapport annuel. Il constitue un long opus de 300 pages, dont seulement deux sont consacrées à des propositions « susceptibles d’inspirer les réformes à entreprendre ». Chargé par le ministère d’être à la fois « un observateur, un consultant et une force de proposition », composé de personnalités aussi diverses que le photographe Yann Arthus-Bertrand, le président de la Cité de l’architecture et du patrimoine, François de Mazières, ou la sénatrice maire de Cuchery (Marne), Françoise Férat, le Haut Conseil s’est réuni lors de dix séances plénières organisées au cours de l’année 2006. L’occasion d’auditionner une trentaine de professionnels, recteurs, proviseurs, inspecteurs de l’Éducation nationale, auteurs de divers rapports sur le sujet, et un responsable d’institution culturelle en la personne de Stéphane Martin, président du Musée du quai Branly, à Paris. Les participants se sont souvent égarés dans des questions d’ordre sémantique – faut-il ou non conserver le terme d’éducation artistique « et culturelle » ? Quelle est la pertinence du concept de « pratique artistique » ? Ils ont aussi énoncé quelques lieux communs – oui, le « rapport aux œuvres » est une notion primordiale ; bien sûr, il faut veiller à une meilleure égalité territoriale – avant de parvenir à proposer quelques mesures (douze au total). Partant du constat que le budget alloué à l’éducation artistique et culturelle est pour le moins « difficile à évaluer », le Haut Conseil prône en premier lieu la sanctuarisation des moyens qui lui seront alloués, avec la création d’un bureau unique au sein du ministère de l’Éducation nationale. Le texte recommande ensuite de rendre « plus cohérent » les références aux arts et à la culture dans les récents décrets relatifs au « socle commun de connaissance et de compétence » – notion aujourd’hui violemment remise en question par l’ensemble des syndicats enseignants qui craignent l’instauration d’une école à deux vitesses.
« Label de reconnaissance »
Pour que l’histoire de l’art soit, enfin, enseignée dès le primaire, le Haut Conseil préconise de s’inspirer de l’expérience « Rencontre avec l’œuvre d’art » (mise en place au collège en 1993) ainsi que du système des cours optionnels du lycée. Il omet cependant de rappeler que ces cours sont actuellement dispensés par des professeurs d’histoire, de français, d’art plastique, voire de langue, et jamais par des historiens de l’art ! Ce problème, pourtant essentiel, serait résolu, d’une part en renforçant, au sein des IUFM [Instituts de formation des maîtres], les formations destinées à obtenir des « certifications complémentaires » (en place depuis 2004), d’autre part avec la mise en place d’une « politique régulière de formation des personnels d’encadrement et de direction » en collaboration avec l’ESEN (École supérieure de l’éducation nationale). Pas une seule fois, il n’est fait allusion à un éventuel Capes ou à une agrégation d’histoire de l’art – signalons d’ailleurs que le Haut Conseil ne comprend aucun historien de l’art… Enfin, le rapport appelle de ses vœux la création d’« une université européenne des arts hors les murs », c’est-à-dire « d’un réseau international d’établissements d’enseignement artistique supérieur habilités à fonctionner dans le cadre du système LMD [Licence Master Doctorat] », et ce sans jamais évoquer l’Institut national d’histoire de l’art (INHA) pourtant apte à développer ce type de missions. Ultime recommandation : mettre sur pied un observatoire des « bonnes pratiques », avec distribution de bons points pour les meilleurs projets, sous la forme d’un « label de reconnaissance » attribué par le Haut Conseil et d’un « prix de l’éducation artistique et culturelle » décerné par le Premier ministre lui-même, et financé par du mécénat. Pour « valoriser les mérites individuels », ces heureuses initiatives pourraient, en outre, être prises en compte dans l’évolution des carrières. Mais comment mener à bien des projets sans budgets supplémentaires ? Le rapport ne fournit aucune donnée chiffrée – si ce n’est pour proposer la création de cent postes de conseillers pédagogiques en arts dans le primaire. Pire, à aucun moment il ne relève le manque de moyens patent dont souffre l’Éducation nationale pour l’instauration effective d’une politique des arts à l’école. Tout comme les derniers rapports sur le sujet (1), le texte remis au ministre le 28 mars reste flou. Il est loin encore le jour où les arts feront réellement leur entrée à l’école, non plus comme distraction, mais comme discipline à part entière.
(1) lire les JdA no 208, 4 février 2005, p. 5, et no 252, 2 février 2007, p. 3
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Les douze suggestions de l'HCEAC
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°257 du 13 avril 2007, avec le titre suivant : Les douze suggestions de l'HCEAC