À Bruxelles, le Millennium Iconoclast Museum of Art (Mima) est contraint de fermer pour un problème de voirie.
Bruxelles. Le 5 janvier 2025, le Millennium Iconoclast Museum of Art (Mima) fermera ses portes après neuf ans d’existence, 17 expositions et plus de 400 000 visiteuses et visiteurs. Le Mima, implanté dans les murs d’une ancienne brasserie, dans la commune bruxelloise de Molenbeek était souvent identifié comme le musée du street art. Son directeur préfère cependant le présenter comme l’expression d’artistes d’aujourd’hui issus de toutes les formes de culture visuelle alternatives, des fresques urbaines, aux comics, jeux vidéo, publicité, illustration et même tatouage. La raison invoquée pour la fermeture a de quoi étonner : en raison de l’instabilité d’un pont, la principale route d’accès au musée le long du canal a dû être fermée aux véhicules en attendant sa réfection, avec pour conséquence une chute drastique de la fréquentation.
« Quand j’explique aux artistes étrangers programmés pour 2025 que leur expo tombe à cause d’une histoire de route qui va mettre cinq à six ans à être réparée, il y a un côté absurde », reconnaît Raphaël Cruyt, co-fondateur et directeur du musée. Une des raisons de cette décision brutale est à trouver dans le modèle de financement particulier du musée qui s’est mis en place sans soutiens publics. « Notre volonté, c’était d’avoir un musée qui touche le public le plus large possible avec un modèle économique reposant sur la fréquentation. Si le public soutient le projet en payant son ticket, alors on a une raison d’exister et on continue, sinon on ferme. »
Ainsi, 50 % du financement provenait de la billetterie, 15 % d’un crowdfunding annuel et 35 % de subsides non structurels et de partenaires privés. À cela s’est ajouté l’aide de trois mécènes qui ont chacun accordé pour le démarrage un prêt de 200 000 euros et parti- cipé, chacun à hauteur de 150 000 euros, à l’achat d’une collection dont ils sont partiellement propriétaires.
C’était donc un modèle fragile avec une structure légère qui n’employait que cinq personnes à temps plein en dehors des quatre fondateurs. Le Mima occupait une niche qu’aucun autre musée n’occupe. Les artistes étant souvent peu connus d’une grande partie du public, la scénographie était conçue pour embarquer dès l’entrée les visiteurs, y compris les plus jeunes, dans les expositions. Le public, essentiellement bruxellois, a répondu à la proposition, attirant ainsi entre 40 000 et 60 000 visiteurs par exposition.
Juste avant la première annonce des futurs travaux de voirie, le Mima avait signé un accord avec le propriétaire pour une extension afin de disposer d’un espace supplémentaire pour accueillir des événements privatisés et générer des revenus.
Face à l’absence d’un calendrier des travaux, la direction a rapidement réalisé que la situation était loin d’être passagère. « Cela rendait impossible d’imaginer une situation de transition. Sans perspective d’un retour à la normale, on pouvait faire une croix sur l’extension et les revenus générés, ce qui mettait à mal notre modèle fragile. »
L’annonce de la fermeture a suscité un mouvement de sympathie de la part du public ce qui a provoqué une affluence plus importante ces dernières semaines. Du côté des autorités communales ou régionales, par contre, on se taisait dans toutes les langues.« Ce n’est pas comme si on avait été victime d’une catastrophe naturelle, tout ceci est le résultat de la complexité des institutions. Personne n’est responsable mais tout le monde a quelque chose à dire, et cela montre l’impossibilité de réagir dans une situation d’urgence. »
Les fondateurs cherchent aujourd’hui un nouvel emplacement d’une surface d’au moins 1 000 m2, à l’image de celui qu’ils occupaient le long du canal, avec un espace conçu pour faire circuler le public et prolonger la visite. Une décision devra être prise d’ici à février, voire mars, pour envisager la poursuite de l’aventure. Mais un nouveau lieu sera de toute manière synonyme d’un nouveau projet et d’un nouveau modèle de financement.
Raphaël Cruyt est aussi co-fondateur de la galerie Alice qui va déménager du centre-ville vers la commune d’Ixelles pour reprendre les murs de l’ancienne galerie d’Albert Baronian qui baisse le rideau après plus de cinquante ans d’activité artistique.
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Le Mima en pause pour une durée indéfinie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°646 du 3 janvier 2025, avec le titre suivant : Le Mima en pause pour une durée indéfinie