Moins de 40 % des Italiens ont ouvert un livre l’an dernier pour des raisons qui ne soient pas strictement scolaires et 35 % de la population est analphabète fonctionnelle.
rome. Si on en croit l’inscription au fronton du Colisée carré à Rome, les Italiens sont « un peuple de poètes, d’artistes, de héros, de saints, de penseurs, de scientifiques, de navigateurs, de migrants »… mais pas de lecteurs. Sans compter les obligations scolaires ou universitaires, moins de 40 % des habitants de la péninsule ont ouvert au moins un livre l’an dernier. La péninsule est une nouvelle fois dans les tréfonds du dernier classement de l’OCDE sur l’évaluation des compétences des adultes. 35 % des Italiens sont « analphabètes fonctionnels » c’est-à-dire qu’ils peuvent déchiffrer un texte ou effectuer un calcul, mais ils ne parviennent pas à en comprendre le sens ou la complexité du raisonnement.
Cause ou conséquence de ce phénomène, les bibliothèques du pays ne figurent pas parmi les priorités du gouvernement. Y compris les plus prestigieuses comme celle d’archéologie et d’histoire de l’art, Biasa, à Rome, ou celle de Brera, Braidense, à Milan. Jusque dans les années 1980, sur un total de 130 employés, la Biasa comptait une dizaine de bibliothécaires. La dernière vient tout juste de prendre sa retraite. À la Braidense, au cours des quinze dernières années, le nombre d’employés s’est effondré de 145 à une trentaine dont deux bibliothécaires. Tandis que l’organigramme du ministère de la Culture en prévoit 445 dans ses effectifs, seuls 130 sont effectivement en service.
Alors que la France compte plus de 15 500 bibliothèques sur l’ensemble de son territoire, l’Italie n’en dispose que de 7 549 avec les deux tiers des communes qui disposent de ce lieu de culture. Mais les disparités régionales y sont particulièrement prononcées puisque 40 % des communes qui n’ont pas de bibliothèques se trouvent dans le Mezzogiorno. 60 % des 7,5 millions des personnes qui n’ont pas de bibliothèque dans leur ville ou village vivent dans le sud de la péninsule. Selon l’Istat en 2021, à peine 7,4 % des Italiens en ont franchi le seuil. Cette année-là, la présidente de l’Associazione Italiana Biblioteche, Rosa Maiello, publiait un communiqué pour dénoncer cette situation :« Depuis des décennies, nous demandons une loi nationale sur les bibliothèques (sur toutes les bibliothèques, de tout type, sur le système des bibliothèques nationales), afin de clarifier leurs objectifs, fonctions, devoirs, prérogatives (…). En particulier, nous demandons depuis des années des investissements politiques et financiers plus importants pour le développement de services de bibliothèque universels et des réformes des droits d’auteur pour faciliter la recherche, l’enseignement et l’accès aux sources de connaissances. »
Elle a été partiellement entendue le 8 octobre dernier lorsque le ministre, Alessandro Giuli, a été auditionné par la Commission Culture de la Chambre des députés. Il estimait « essentiel de réfléchir au rôle des bibliothèques avant-postes de la démocratie, de l’éducation et de la sociabilité » en particulier dans les zones où l’accès à la lecture est limité. « En Italie, il y a plus de livres publiés que de lecteurs », a conclu le ministre qui a promis la mise en œuvre d’un « plan Olivetti » pour la Culture avec des financements de 30 millions d’euros pour les bibliothèques.
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L’état désastreux des bibliothèques publiques
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°646 du 3 janvier 2025, avec le titre suivant : L’état désastreux des bibliothèques publiques