Italie - Antiquaire - Justice

TRAFIC DE BIENS CULTURELS

L’antiquaire italien « ami des Tombaroli » visé par un mandat d’arrêt international

Par Olivier Tosseri, correspondant en Italie · Le Journal des Arts

Le 15 novembre 2024 - 467 mots

Un registre compromettant a été découvert chez Edoardo Almagià, soupçonné par la justice américaine de liens avec les pilleurs de tombes.

Rome, New York. Edoardo Almagià est inconnu du grand public mais pas des directeurs des plus grands musées américains et surtout pas du procureur du district de Manhattan. Ce dernier vient de lancer un mandat d’arrêt international à l’encontre de cet antiquaire italien né à New York il y a soixante-treize ans. En 2006 l’homme se réfugie à Rome pour fuir la justice américaine qui multiplie les enquêtes sur celui qu’elle considère comme un trafiquant d’antiquités volées. En 2021, 200 pièces archéologiques estimées à 10 millions de dollars avaient été restituées à l’Italie par un procureur new-yorkais qui annonçait que 150 étaient passées entre les mains d’Edoardo Almagià. Ses services le traquent depuis des décennies, en collaboration avec le Comando Carabinieri per la Tutela del Patrimonio Culturale (TPC, Commandement des carabiniers pour la protection du patrimoine culturel), une unité de la gendarmerie italienne chargée de la répression du trafic d’œuvres d’art. Ils sont convaincus de liens étroits entre celui que l’on surnomme dans le milieu « l’Américain » et les tombaroli, ces pilleurs de tombes étrusques, pour acquérir les précieuses antiquités, revendues ensuite à de fortunés clients ou à de prestigieux musées parmi lesquels celui de Cleveland et le Getty.

Dénoncé par une ex-compagne

Diplômé en histoire de l’art antique à l’université de Princeton (New Jersey), Edoardo Almagià fréquente dès les années 1980 les sites étrusques de Tarquinia et Cerveteri, participant à des campagnes de fouilles qui ne sont pas toutes légales selon les enquêteurs. Mais ces derniers ne sont jamais parvenus à prouver de manière irréfutable sa culpabilité. Ils lui reconnaissent une certaine verve, une grande culture et un charme indéniable. Mais l’étau se resserre autour d’Edoardo Almagià dont le nom apparaît dans presque tous les scandales de ces trois dernières décennies liés au trafic illicite de biens archéologiques. Il est contraint à se réfugier en Italie où il espérait être hors d’atteinte de la justice américaine. C’était sans compter la vengeance d’une de ses ex-compagnes, selon le quotidien The New York Times. Lors d’une perquisition dans son appartement new-yorkais, elle aurait indiqué la présence d’un registre vert contenant des notes détaillées sur quelque 1 700 objets étrusques, romains et grecs, achetés à divers tombaroli connus pour une valeur de 1 million de dollars environ. Les notes mentionnaient aussi des informations sur leurs acquéreurs. Interrogé par le quotidien La Repubblica, Edoardo Almagià clame son innocence, affirmant n’avoir jamais vendu que des objets d’une valeur dérisoire et défendant la liberté totale dans le commerce des antiquités. Il a qualifié le mouvement de rapatriement des antiquités de « coup publicitaire » et critiqué les autorités italiennes qui dépensent l’argent public dans de telles initiatives au lieu de s’occuper des infrastructures du pays.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°643 du 15 novembre 2024, avec le titre suivant : L’antiquaire « ami des Tombaroli » visé par un mandat d’arrêt international

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