Les statuettes de l’Égypte antique fourmillent de représentations animales de toutes sortes. En vedette, la déesse chatte Bastet.
L’animal est un thème courant de collection, en particulier chez les amateurs d’antiquités à qui s’offre un large choix de représentations, de toutes tailles et en différents matériaux (bois, pierre, bronze, faïence…). On se souvient de la fabuleuse collection Leo Mildenberg (décédé en 2001), lequel avait réuni, en cinquante ans, environ mille animaux issus de toutes les cultures antiques. L’art des temps pharaoniques, connu pour avoir le plus représenté l’animal comme incarnations de divinités, y figurait en bonne place. La collection Mildenberg fut dispersée avec succès chez Christie’s à Londres en octobre 2004. Un petit chat de 5,5 cm en faïence à glaçure verte de la XVIIIe dynastie, finement modelé, et un bronze de 11,4 cm de la XXVIe dynastie figurant le taureau Apis, finement ciselé, ont notamment été emportés pour la somme record de 65 725 livres sterling chacun (94 500 euros).
L’une des icônes les plus prisées du bestiaire égyptien n’est pas une divinité. Il s’agit de l’hippopotame en faïence à glaçure bleue et à décor de plantes aquatiques nilotiques. Il en existe seulement une cinquantaine d’exemplaires, de dimensions variables, conservés dans des musées internationaux. « Déposé au sein du caveau parmi les objets funéraires, il évoquait la représentation du marécage primordial, le Noun, et annonçait ainsi la renaissance du mort », explique l’expert parisien Christophe Kunicki. En fonction de la qualité de la faïence, le prix de ce rare objet varie de 10 000 euros à plus de 100 000 euros, pour les plus grands modèles et les mieux conservés. « Les figurines d’hippopotame apparaissent à la XIIe dynastie, mais leurs dimensions ne dépassent pas les 12-13 cm. Ce n’est qu’à la fin de la Deuxième Période Intermédiaire, à la XVIIe dynastie, qu’elles atteignent des dimensions supérieures à 20 cm, rarement cependant », précise l’expert. De surcroît, ces faïences sont la plupart du temps parvenues jusqu’à nous avec les pattes et le museau volontairement brisés : le but était de protéger symboliquement les récoltes du fléau de cet animal dévastateur, malgré son allure débonnaire.
Chatte et scarabée
Bien que beaucoup plus courante, la chatte, incarnation de la déesse de la fécondité Bastet, a depuis plusieurs années détrôné l’hippopotame. « L’engouement pour Bastet vient certainement de l’affection particulière que les gens portent au chat comme animal domestique », note l’antiquaire spécialisé David Ghezelbash, fier de montrer une gracile Bastet en bronze de taille moyenne (13 cm) sur son stand à la Biennale. Fasciné par l’animal, l’écrivain et ministre de la Culture André Malraux avait expressément demandé à ce qu’une statue de Bastet (copie d’une antique) soit placée à côté de son cercueil, ce qui fut fait en 1996, lors du transfert de ses cendres au Panthéon. Aujourd’hui les collectionneurs sont prêts à débourser plus de 200 000 euros pour une authentique grande statuette féline. Outre les qualités habituelles requises pour un bronze antique (qualité et détails de la ciselure, dimensions importantes – jusqu’à grandeur nature, et bel état de conservation), une majestueuse Bastet se doit d’avoir des proportions et des courbes élégantes. « Si elle est trop raide, elle sera moins cotée », souligne Christophe Kunicki.
Symbolisant l’Égypte antique, le scarabée est un grand classique à collectionner. Il en existe pour tous les budgets. Produit en énorme quantité sous la forme d’amulettes, essentiellement en stéatite, le scarabée s’achète pour moins de 500 euros. Posé sur la momie en lien avec l’organe dont il porte le nom, le scarabée de cœur, en pierre verte, est gravé sur son plat du chapitre XXXB du Livre des Morts, soit une formule pour empêcher que le cœur du défunt ne s’oppose à son entrée dans le monde des morts. Le scarabée de cœur vaut entre 8 000 à 40 000 euros, tandis qu’il faut compter au moins 30 000 euros et jusqu’à 150 000 euros pour un grand scarabée dit commémoratif datant du règne d’Aménophis III (1387-1350 av. J.-C.).
« Ces importantes amulettes, au plat gravé d’un long texte hiéroglyphique narrant certains faits marquants du règne du pharaon, furent émises par le souverain et largement diffusées, dans un but de propagande, depuis le Soudan (Soleb) jusqu’à la Syrie (Ras-Shamra), probablement comme cadeaux aux hauts dignitaires et diplomates. Plus de 200 sont aujourd’hui répertoriées », rapporte Christophe Kunicki. Pour le prix d’un scarabée commémoratif, certains se tourneront vers le dieu lunaire Thot, sous les traits d’un ibis au corps en bois et aux pattes et tête en bronze. Si cet oiseau est très prisé comme emblème de l’Égypte, Thot l’est nettement moins sous sa forme de babouin (en bronze ou en pierre). Anubis, le dieu chacal qui préside à la momification, est une autre valeur sûre de l’art égyptien. Les statuettes en bronze le représentent généralement debout, les bras pendants, ou le bras gauche tendu en avant. Toujours en bronze et à qualité égale, les dieux Horus (faucon) et Apis (taureau) ainsi que la déesse Sekhmet (lionne) qui est en réalité la forme sauvage et destructrice que prend la chatte Bastet lorsqu’elle est en colère, ont une cote plus modérée atteignant rarement plus de 50 000 euros. « Le taureau est apprécié à condition qu’il soit fin », relève David Ghezelbash qui précise encore que « les amateurs d’art égyptien s’attachent aux animaux ayant un beau rendu anatomique, avec un souci du détail, ce qui leur donne un aspect plus vivant et les rend plus désirables ».
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Bestiaire égyptien
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°374 du 7 septembre 2012, avec le titre suivant : Bestiaire égyptien