Le Musée des beaux-arts s’est associée à des laboratoires de recherche scientifique pour mener une expérience, encore en cours, avec 200 jeunes volontaires sur les effets produits par une œuvre d’art sur le cerveau.

Caen (Calvados). Si les bienfaits du sport ou du sommeil sont communément admis, ceux de l’art restent encore à démontrer. Quel est l’impact d’une visite au musée sur notre bien-être et nos émotions ? Pour y apporter une réponse scientifique, le Musée des beaux-arts de Caen s’est associé à des chercheurs caennais pour mener l’expérience « Art, bien-être, cerveau », soutenue actuellement dans le cadre du Millénaire de Caen. Un projet ambitieux, qui consiste à mesurer précisément l’impact de la visite du musée sur le fonctionnement cérébral à l’aide de tout un équipement de pointe. Si des initiatives similaires ont été menées dans d’autres pays, avec en premier lieu un programme précurseur au Musée des beaux-arts de Montréal en 2012, l’expérience se fait ici à bien plus grande échelle.
Les participants : un panel de 200 individus, âgés de 18 à 65 ans et en bonne santé (selon leur déclaratif). Aucun n’a visité le musée au cours des dix dernières années, ils ne sont donc pas familiers des œuvres exposées. Car, point d’importance, l’expérience ne se déroule pas en laboratoire mais en « milieu écologique », c’est-à-dire directement dans les murs du Musée de Caen. Les volontaires en arpentent les espaces, dotés pour nombre d’entre eux de lunettes intelligentes (eye tracking)– qui permettent de voir où se dirige leur regard en temps réel – et d’un système Nirs (infrarouge), un casque qui mesure l’activité neuronale et la fréquence cardiaque.
On mesure alors leurs réactions à trois types de tableaux : des portraits, des paysages et des scènes de genre (on peut regretter l’absence d’art abstrait). Dans la première phase du protocole, les 200 individus ont été répartis en 3 groupes. 40 participants ont déambulé dans le musée sans équipement, répondant seulement à des questionnaires sur leurs ressentis en début et fin de visite. Une sorte de « groupe contrôle ». Par ailleurs, 80 autres participants, cette fois-ci équipés, ont contemplé plusieurs tableaux, parfois seuls, parfois avec un médiateur qui leur parle de l’œuvre. Le dernier groupe, de 80 participants aussi, a fait exactement la même chose mais avec un choix de tableaux en partie différent. Une fois tous les participants passés en individuel, intervient la seconde phase. L’expérience devrait se terminer fin avril. Pour cette deuxième visite, ils sont regroupés en binôme et vont revoir les tableaux. Certaines œuvres qu’ils ont tous les deux vus précédemment, d’autres que seul l’un d’entre eux connaît. Ce dernier pourra alors jouer le rôle de médiateur.
Pour l’heure, il va falloir prendre son mal en patience car les données, une fois récoltées, doivent encore être analysées. Avec pour objectif une présentation des premiers résultats d’ici à la fin de l’année. Des données qui resteront toutefois à prendre avec précaution, car une telle mise en situation provoque sans doute des émotions différentes de celles d’une visite classique (un stress exacerbé, des réactions peut-être moins naturelles…). Mais l’expérience promet assurément d’en apprendre plus sur nos processus comportementaux, émotionnels et cognitifs face à l’œuvre, et sur le rôle que joue la médiation dans la visite. Un projet qui ouvre donc de nombreuses perspectives, y compris dans le champ thérapeutique. « On aimerait ensuite pouvoir reproduire ce type de protocole en binôme avec un patient Alzheimer et son aidant, un non-voyant et son aidant, un enfant autiste et son auxiliaire de vie sociale… », précise Denis Vivien, directeur de l’Institut BB@C et professeur à l’université de Caen-Normandie (deux des institutions qui mènent le projet).
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s

« Art, bien-être, cerveau » au Musée de Caen
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°651 du 14 mars 2025, avec le titre suivant : « Art, bien-être, cerveau » au Musée de Caen