Paris
PARIS [29.02.16] - L’architecte Claude Parent est décédé samedi dans sa 93e année. Il avait théorisé avec l’urbaniste Paul Virilio et mis en œuvre le plan incliné, le déséquilibre, dans ses constructions. On lui doit des églises, des hypermarchés et même des centrales nucléaires.
Le pape de l’oblique a pris définitivement la tangente. Claude Parent, architecte, génial dessinateur et fieffé visionnaire, est décédé, samedi 27 février, à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), sa ville natale, « juste un jour après son 9e anniversaire », comme le précise un message posté, hier, sur sa page Facebook officielle. Le 13 janvier dernier, malgré une santé fragile, il était néanmoins présent, à la Galerie Alaïa, à Paris, au vernissage de l’exposition « Musées à venir » concoctée en duo avec son alter ego et disciple de la première heure, Jean Nouvel.
Né en 1923, Claude Parent était certes peu connu du grand public, mais son aura auprès de nombre d’architectes était inversement proportionnelle. En particulier grâce à un concept formalisé, en 1963, avec le philosophe et urbaniste Paul Virilio, la « fonction oblique », autrement dit : « La fin de la verticale comme axe d’élévation, la fin de l’horizontale comme plan permanent, ceci au bénéfice de l’axe oblique et du plan incliné ». En clair : incliner les sols des bâtiments pour générer une dynamique plus forte. Leur chef-d’œuvre à quatre mains : l’église Sainte-Bernadette-du-Banlay, à Nevers (1966), monolithe de béton sans fenêtre, replié sur lui-même.
Après des études de mathématiques, Claude Parent fréquente l’atelier de Noël Le Maresquier à l’École des beaux-arts de Toulouse, puis effectue des stages à Paris, notamment chez Jean Trouvelot et Le Corbusier, avant d’être diplômé architecte en 1955. Avec André Bloc, architecte et directeur de la revue L’Architecture d’aujourd’hui, et ses collègues iraniens Mohsen Foroughi et Heydar Ghiai, il conçoit, en 1969, la Maison de l’Iran à la Cité universitaire de Paris.
Désigné commissaire du Pavillon français à la Biennale de Venise, en 1970, il introduit l’oblique à l’envi, et donc le déséquilibre, le mouvement. Idem dans ses projets réels, tels le supermarché Carrefour de Sens, bloc de béton incliné, ou la maison Drusch, à Versailles, drôle de cube renversé. L’architecte œuvre aussi pour les centrales nucléaires comme celles de Cattenom, en Lorraine, et de Chooz dans les Ardennes.
Grand prix national d’architecture en 1979, élu, en 2005, membre de l’Académie des Beaux-Arts, Claude Parent était, jadis, un provocateur né. Face à ses promoteurs, il aimait ainsi en rajouter, n’hésitant pas à débarquer sur ses chantiers en costume impeccable au volant d’une Maserati ou d’une Rolls Royce aux couleurs éclatantes. La moustache devenue blanche, l’homme était d’une courtoisie extrême. Théoricien dans l’âme, il a produit une série de livres comme Vivre à l’oblique (éd. L’Aventure urbaine, 1970) ou Cuit et archi-cuit/Le Déclin/L’Architecture (éd. L’Œil d’or, 2003). Dans un truculent « Portrait d’un obliquonaute » (Portraits d’architectes, éd. Norma, 2005), Parent avait d’ailleurs écrit de l’un de ses commanditaires des mots qui pourraient amplement lui être attribués : « Il reçut l’oblique comme Perceval le Graal, une illumination. »
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La disparition de Claude Parent, « l’architecte de l’oblique »
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Abonnez-vous dès 1 €Claude Parent à Paris le 19 janvier 2010. Il est décédé le 27 février 2016 à l'âge de 93 ans © photo JOEL SAGET / AFP