PARIS
Vasantha Yogananthan pourrait faire l’éloge de la lenteur. Du moins dans sa manière d’envisager la photographie.
Car du côté de la reconnaissance de son travail, les événements se précipitent. En ce début d’année, il fait l’objet de deux expositions personnelles : l’une au Musée de l’Élysée à Lausanne, l’autre à la Galerie Folia à Paris. Elles sont les premières dans son parcours de dix ans à peine. Leur concordance n’a nullement été voulue. Tatyana Franck, directrice du Musée de l’Élysée, a programmé la présentation des quatre premiers chapitres de Myth of Two Souls avant qu’il ne soit le lauréat 2018 du Prix Camera Clara, qui récompense chaque année un auteur pour son travail à la chambre photographique. Ce sont justement les images de Myth of Two Souls (mythe de deux âmes) qui ont été primées. Pourtant, quand il s’engage en 2013 dans cette vaste épopée basée sur le récit du Ramayana, le photographe ne sait pas où celle-ci le mènera, « pas plus que les décisions importantes prises cette année-là », ajoute-t-il. « 2013 a été une année charnière dans mon parcours. Je quitte l’agence Picturetank où j’avais été éditeur photo pendant cinq ans et fonde avec Cécile [Poimbœuf-Koizumi, sa compagne, ndlr] Chose commune pour l’édition de Piémanson», un premier livre photo.
Le Grenoblois d’origine, arrivé à Paris en 2003 après des études d’histoire et de journalisme, a trouvé sa voie dans l’édition de ce premier projet au long cours, une manière aussi de travailler l’argentique en parfaite adéquation avec sa manière d’envisager et de pratiquer la photographie dans un temps étiré. Pendant cinq étés, de 2009 à 2013, Vasantha Yogananthan a vécu en effet avec les vacanciers de Piémanson, unique grève sauvage de Camargue alors non réglementée. Dès la parution de l’ouvrage, la grande douceur des images, leur profonde empathie dénuée de toute sentimentalité ou de raillerie et le traitement laiteux de la couleur ont été remarqués, la rigueur et la qualité de l’édition également. On les retrouve dans Myth of Two Souls, bien que le projet ait rapidement quitté l’approche documentaire de Piémanson pour privilégier la chambre (du moins jusqu’en 2017), la mise en scène et la photographie noir et blanc colorisée à la main par le peintre indien Jaykumar Shankar.
Composé de sept volumes basés sur les sept chapitres du Ramayana, le projet amorcé en Inde en 2013 divulgue, depuis le premier volume intitulé Early Times, sa propre interprétation de l’histoire de Rama et Sita, prince et princesse d’Ayodhya condamnés pendant quatorze années de leur existence à l’errance de l’Inde au Sri Lanka. The Promise, Exile ou Dandaka : aucun des trois autres épisodes édités jusqu’à présent ne se ressemble dans sa forme ou son atmosphère, si ce n’est dans ce mélange de réel, de fiction et de temporalités que l’on retrouve dans chaque ouvrage. « J’ai besoin à chaque fois de sortir de ma zone de confort », dit-il. Non sans succès. D’année en année, le projet récolte son lot de prix. Quand on l’interroge sur les raisons de cette entreprise, Vasantha Yogananthan reconnaît que si son père n’était pas Sri Lankais, il ne l’aurait pas menée. C’est en allant en Inde et en voyant comment le Ramayana, lu enfant, imprégnait la société qu’il a voulu en faire une lecture contemporaine. D’ici à 2020 sont attendus les trois derniers épisodes. Que l’on connaisse ou non la fin de cette odyssée, on ne manquera pas d’être surpris, c’est certain.
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Vasantha Yogananthan
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°720 du 1 février 2019, avec le titre suivant : Vasantha Yogananthan