PARIS
Dans son cadre Belle Époque, le restaurant du Musée d’Orsay évoque l’atmosphère des grandes brasseries parisiennes. Mais l’assiette déçoit.
Le Musée d’Orsay abrite, outre de nombreux chefs d’œuvres, deux restaurants gérés par Musiam Paris (groupe de restauration présent dans plusieurs lieux culturels, accompagné par le chef Alain Ducasse pour garantir son identité culinaire). La table du deuxième étage, la plus haut de gamme, occupe la salle à manger historique. Plafond peint (par Gabriel Ferrier), lustres en enfilade, dorures et statue de nymphe en marbre (Suzanne, de Théophile Barreau, 1893), son cadre 1900 est classé au patrimoine. Mais comment meubler une salle Belle Époque susceptible d’accueillir jusqu’à 300 couverts à chaque service ? On reste peu convaincu par le choix esthétique des chaises en polycarbonate coloré du designer Jacopo Foggini, sans aucun doute très fonctionnelles, mais dont la présence anachronique évoque surtout la dérive des continents de plastique à la surface des océans – ce qui nous rend un peu tristes.
Tandis que les files d’attente s’allongent démesurément devant le musée – en passe de battre un nouveau record d’affluence avec l’exposition évènement consacrée aux derniers mois de Van Gogh à Auvers-sur-Oise – on ne peut qu’admirer le ballet imperturbable des serveurs qui prodiguent aux quatre coins de la salle de copieuses entrecôtes garnies de frites dorées ou des beignets de cabillaud tièdes et croustillants.Le lieu évoque l’atmosphère des grandes brasseries parisiennes, aux assiettes aussi efficaces qu’inoffensives en termes de saveurs. La carte parvient à ménager tous les goûts, du saucisson pistaché en brioche au gruau végétarien de céréales et de légumineuses, baignant dans le lait de coco, agrémenté de fines lamelles de carottes al dente et de grains de grenade. En clin d’œil au peintre des Tournesols, quelques plats plus exotiques sont concoctés pendant la durée de l’exposition par le chef Yann Landureau, comme une cuisse de canard confite au chou de Pontoise façon Stamppot (une spécialité néerlandaise).
Attablé près des hautes fenêtres de l’ancien pavillon Amont, on aperçoit la Seine, et la pointe de l’obélisque de la Concorde brillant dans la grisaille. Aucune odeur de cuisson n’émane de ce réfectoire luxueux et l’on se demande, en contemplant les travées centrales, si comme sur les vols longs courriers, les plats sont livrés sur place prêts à être réchauffés. Le serveur nous assure cependant le contraire, la cuisine étant simplement située à l’autre bout du bâtiment. Un conseil : mieux vaut rassasier son regard avant de contenter son estomac, afin de conserver toute sa gourmandise pour les fantastiques collections du musée.
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Un faux luxe à la française
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°772 du 1 février 2024, avec le titre suivant : Un faux luxe à la française