LONDRES - Martin Parr est actuellement en pourparlers pour faire don de son immense collection de photographies anciennes et contemporaines à la Grande-Bretagne. Photographe de l’agence Magnum réputé pour son regard sardonique sur la société moderne, il est également collectionneur.
Pendant vingt ans, il a assemblé un vaste catalogue de 700 clichés documentaires et maquettes d’albums, regroupant le travail de 18 photographes et couvrant les cinquante dernières années. « J’ai commencé à collectionner ces pièces, car personne ne le faisait aussi sérieusement qu’il le fallait à mon sens, explique Parr. En Grande-Bretagne, on marginalise la photographie, alors qu’en Europe continentale, son statut est bien plus élevé.»
Clichés des années 1980
Une sélection de ses photographies documentaires et de ses albums est actuellement visible au Jeu de paume à Paris (jusqu’au 27 septembre), dans le cadre d’une exposition qui emprunte également à ses collections de cartes postales et autres objets divers. On y retrouve les œuvres en noir et blanc, dépeignant les loisirs des Britanniques dans les années 1960, par Tony Ray-Jones (l’une des premières influences de Parr), et les images des camps de vacances Butlins, prises par John Hinde entre 1968 et 1972. Le travail de Peter Mitchell vient, pour sa part, illustrer l’apparition de la couleur. La collection est particulièrement riche en clichés des années 1980 avec des artistes comme Paul Graham, Chris Killip et Graham Smith qui ont chroniqué les paysages industriels et les villes tombées dans la pauvreté de l’Angleterre de Margaret Thatcher. « Le MoMA [Museum of Modern Art], à New York, a présenté une exposition de photographies britanniques des années Thatcher en 1991 mais, en Grande-Bretagne, ce travail est dédaigné », regrette Martin Parr, précisant que la manifestation a été montée par la Haus der Kunst de Munich. « L’exposition a un retentissement extraordinaire à Paris », poursuit le photographe. D’après le musée parisien, 56 000 visiteurs se sont pressés dans les salles au cours des sept premières semaines. « En Grande-Bretagne, nous avions amorcé des pourparlers avec un musée londonien, mais les conservateurs n’en ont pas voulu, déplore Martin Parr. La plupart des photographes de ma collection ne sont pas représentés par des marchands, et personne ne les connaît dans le monde de l’art.»
Pour rééquilibrer la balance, il souhaite voir sa collection accueillie par un musée national. « J’ai rencontré [le directeur de la Tate] Sir Nicholas Serota à deux reprises, de même que j’ai été en contact avec le Victoria & Albert Museum. Mais il est trop tôt pour dire où la collection ira. Qu’elle soit déposée en prêt ou vendue reste encore à définir, mais je n’ai pas l’intention d’en tirer profit.» Si la Tate achète des photographies de manière sporadique et le Victoria & Albert Museum finance des acquisitions en partie grâce aux droits de reproduction des archives des portraits royaux de Cecil Beaton (qui s’élèvent entre 5 000 et 8 000 livres sterling par an, soit entre 6 000 et 9 000 euros), aucun musée national britannique ne représente in extenso les photographes de la collection de Parr. À l’exception du National Media Museum à Bradford (Yorkshire) qui possède un fonds important, où figurent les archives de Tony Ray-Jones. Or, Martin Parr estime que sa collection est unique : « C’est la collection d’un photographe, pas celle d’un conservateur. Elle inclut des œuvres qui ont eu de l’influence sur moi comme sur d’autres photographes.» La Tate et le Victoria & Albert Museum n’ont pas souhaité faire de commentaires.
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°309 du 18 septembre 2009, avec le titre suivant : Un don à la nation Britannique