VERSAILLES
Laissé à l’abandon par l’État pendant dix ans, l’ancien hôpital royal de la fin du XVIIIe siècle a bénéficié d’une réhabilitation et d’une requalification complètes.
VERSAILLES - Le 16 avril, un aréopage d’officiels s’était donné rendez-vous boulevard de la Reine à Versailles (Yvelines) pour célébrer la renaissance de l’hôpital Richaud, un ensemble architectural construit sur ordre de Louis XVI et achevé sous le Second Empire. L’architecte Jean-Michel Wilmotte et l’architecte en chef des Monuments historiques Frédéric Didier ont signé la requalification du site patrimonial, désormais transformé en majeure partie en logements. La ministre de la Culture, Fleur Pellerin, manquait à l’appel, et pour cause : cette réhabilitation est due à la seule volonté de la Ville de Versailles.
En avril 2009, l’ancien ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon, alors président du château de Versailles, s’était personnellement ému de l’état de déshérence dans lequel le ministère de la Justice avait laissé l’ancien complexe hospitalier. Une dizaine d’années plus tôt, une fois achevé le transfert des activités médicales vers le nouvel hôpital Mignot au Chesnay (Yvelines), l’État avait racheté l’édifice néoclassique pour 3,7 millions d’euros, pensant y installer la cour d’appel et la cour d’assises de Versailles, très à l’étroit dans leurs locaux actuels. Mais, le projet ayant capoté, l’ancien hôpital royal subit de plein fouet l’indifférence de l’État. Abandonné à son triste sort, le site devint le terrain de jeu privilégié de squatteurs, taggueurs et autres consommateurs de drogue ayant trouvé dans la crypte une salle de shoot des plus discrètes. Plus grave, la chapelle classée au titre des monuments historiques depuis 1980 fut saccagée, ses éléments architecturaux détruits et ses vitraux brisés. Pour parfaire le tout, trois incendies, dont le dernier est survenu en 2009, sont venus successivement aggraver la situation.
Promesse de campagne
Comment qualifier la décision de France Domaine, missionné par la garde des Sceaux, de proposer le site à la revente pour la modique somme de… 16 millions d’euros ? Penser réaliser une plus-value de près de 12 millions d’euros sur un ensemble architectural passablement dégradé ne peut relever que du cynisme. Face à ce mépris, François de Mazières apparaît tel le chevalier blanc : la réhabilitation de l’édifice était l’une de ses promesses de campagne de 2008 et la municipalité a pris en charge la pose de clôtures et le gardiennage du site après que l’État eut jeté l’éponge. Fin 2009, sur fond de mobilisation de plusieurs associations de sauvegarde du patrimoine, le député maire de Versailles finit par trouver en Norbert Dentressangle le soutien financier qui lui manquait pour rendre au site son lustre d’antan – d’autres promoteurs attendaient avec impatience l’opportunité de raser le site.
À la suite de négociations avec Éric Woerth, alors ministre du Budget, François de Mazières parvient ensuite à diviser par deux le prix exigé par France Domaine. En l’espace de quelques instants, la Ville fait alors l’acquisition du site qu’elle revend dans la minute à la société Financière Norbert Dentressangle, actionnaire majoritaire du promoteur Ogic, tout en restant propriétaire de la chapelle royale et des jardins pour un euro symbolique.
Tandis que Frédéric Didier (agence 2BDM) a supervisé l’aspect patrimonial du chantier, l’agence Wilmotte & associés a été chargée de repenser le quartier dans sa globalité. Le projet, d’une superficie de 28 000 m2 et d’un budget de 90 millions d’euros, s’étend à la création de deux îlots érigés de part et d’autre de l’édifice historique. Ce dernier comprend 66 appartements haut de gamme, un espace culturel situé dans l’ancienne chapelle, une crèche municipale et des locaux adaptés à l’exercice de professions libérales, le tout organisé autour de trois jardins publics réaménagés par les paysagistes François Neveux et Bernard Rouyer. Les nouveaux immeubles offrent pour leur part 91 logements sociaux (parmi lesquels 82 chambres d’une résidence étudiante), 160 logements d’accès libre et des commerces. Enfin, l’ancien oratoire, toujours en cours de restauration, accueillera l’Académie des sciences morales, des lettres et des arts de Versailles.
Pour cette requalification réussie dans son ensemble, quelques regrets subsistent cependant : la qualité de la restauration, très approximative par endroits ; certains partis pris esthétiques discutables comme la création d’un bassin au cœur du quadrilatère dont la banalité contraste avec la noblesse de l’ensemble ; enfin l’aseptisation sur un mode contemporain de l’ancienne crypte.
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L’hôpital Richaud, le phénix de Versailles
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Abonnez-vous dès 1 €L'Espace culturel Richaud, dans l'ancienne chapelle de l'hôpital royal de Versailles. © Ville de Versailles.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°435 du 8 mai 2015, avec le titre suivant : L’hôpital Richaud, le phénix de Versailles