Archéologie

Le succès des musées de sites archéologiques

Faire comprendre un lieu et une histoire

Par Jérôme Bernard · Le Journal des Arts

Le 1 juillet 1995 - 808 mots

PARIS

Inventés il y a moins de trente ans, les musées de sites archéologiques ne se contentent pas d’exposer, ils ont toujours pour ambition de faire comprendre, avec le risque de verser dans la subjectivité idéologique.

D’invention relativement récente – ils ont moins de trente ans –, les musées de sites archéologiques devraient se multiplier à l’avenir. Les intervenants de la journée-débat organisée en mai par le Musée du Louvre n’ont pu que constater le succès rencontré par ce type de musées auprès du public.

"C’est peut-être la formule idéale dans beaucoup de cas. Le musée de site replace les objets dans leur contexte et leur zone de provenance. Il a un rôle social à jouer", remarquait Jean-Pierre Mohen, directeur du Laboratoire de recherche des Musées de France et animateur du débat. L’ambition des musées de sites archéologiques est en effet de conserver un patrimoine mais aussi de faire comprendre un site, voire une civilisation.

Le Musée d’archéologie et d’histoire de Montréal, inauguré en 1992 sur le lieu même de la naissance de la ville, à Pointe à Callière, permet ainsi de retracer l’histoire de Montréal à travers les âges, et tente de répondre à la quête d’identité du public. Mais comme il est éclaté sur trois sites, la difficulté a consisté à créer un parcours muséographique cohérent. Le parti pris a été celui de l’authentique, c’est-à-dire de restituer les vestiges tels qu’ils avaient été découverts.

"Les musées de site ont commencé par être des réserves organisées. Ce fut le cas de Delphes, en Grèce. L’objet à conserver avait la priorité. Par la suite, le musée de site est devenu un moyen d’introduction au site et plus seulement un lieu d’exposition", constatait Azédine Beschaouch, chargé de mission auprès du sous-directeur général pour la Culture à l’Unesco. Le projet de musée autour des restes d’un bateau romain à Comacchio, dans la plaine du Pô en Italie, a l’avantage de recréer la vie dans le delta du fleuve à l’époque antique.

"Le problème est que ce souci pédagogique entraîne souvent un discours idéologique. Quand le musée de Carthage en Tunisie a été créé, il y a près d’un siècle, la période punique a été exaltée ainsi que les premiers temps du christianisme, à cause des Pères blancs. La période romaine a été ignorée. C’est le danger rencontré par les musées de sites", estimait Azédine Beschaouch. "Nous avons fait attention à respecter la vision de l’histoire amérindienne sans privilégier la vision européenne", précisait Francine Lelièvre, directrice du Musée de Montréal.

L’intégration des musées de sites dans le paysage n’est pas toujours facile. En milieu urbain, ils doivent faire face à des conditions d’aménagement délicates et à des problèmes de sécurité. C’est notamment vrai en Italie pour les parcs archéologiques de Pompéi et d’Herculanum. "Les musées de sites sont un défi très intéressant pour les architectes", a expliqué Spencer de Grey, de l’équipe de l’architecte britannique Norman Foster, prenant pour exemple le projet du musée de Quinson dans les gorges du Verdon.

Les vestiges archéologiques découverts dans des cavernes de la région y seront présentés. Pour incorporer le musée dans le paysage, l’équipe de Foster a imaginé un bâtiment de forme ovale à moitié enterré, avec la lumière naturelle entrant par le toit. Cette architecture veut rappeler l’atmosphère d’une grotte. Le visiteur devrait ainsi mieux comprendre la provenance des objets.

Plus de 200 musées en France

L’Hexagone est riche de plus de 200 musées de sites archéologiques répartis sur tout le territoire. Du plus modeste au plus célèbre, comme le Musée des Eyzies-de-Tayac (Grottes de Lascaux), la palette est riche. Parmi les plus importants, on compte :
- Musée national de préhistoire aux Eyzies-de-Tayac en Dordogne.
- Musée de l’Arles antique, qui vient d’ouvrir et qui regroupe des collections archéologiques jusqu’alors éparpillées.
- Musée départemental d’Aléria, en Corse.
- Musée d’Alésia à Alise-Sainte-Reine, en Côte-d’Or.
- Musée des tumulus de Bougon à La Mothe Saint-Héray, dans les Deux-Sèvres.
- Musée archéologique de Sallèles-d’Aude à Ginestas, dans l’Aude, qui a pour vocation de protéger et de montrer un ensemble de fours de potiers gallo-romains.
- Base archéologique du Mont-Beuvray à Villapourcon, dans la Nièvre, sur le site de l’ancienne Bibracte, capitale des Eduens.
- Musée archéologique à Lattes, dans l’Hérault, résultat des fouilles de l’ancienne Lattara.
- Musée de la civilisation gallo-romaine, à Lyon.
- Musée d’histoire de Marseille.
- Musée des docks romains à Marseille sur le site mis au jour en 1947. Présentation d’une trentaine de "dolia", épaves de bateaux grecs et romains.
- Musée d’art et d’histoire à Metz, sur le site des thermes antiques.
- Crypte archéologique de Notre-Dame, à Paris.
- Musée des thermes et de l’Hôtel de Cluny, à Paris.
- Musée James Miln-Zacharie Le Rouzic à Carnac, dans le Morbihan.
- Musée de la société archéologique à Plancoët, dans les Côtes-d’Armor.
- Musée archéologique à Enserune, dans l’Hérault.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°16 du 1 juillet 1995, avec le titre suivant : Le succès des musées de sites archéologiques

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