New York

Le nouveau MoMA se prépare en coulisse

Le Journal des Arts

Le 21 novembre 2003 - 792 mots

Le Museum of Modern Art de New York se restructure avant sa réouverture. John Elderfield recrute pour le département des Peintures et des Sculptures qu’il dirige.

NEW YORK - D’ici un an, le Museum of Modern Art (MoMA) de New York inaugurera l’extension réalisée par Yoshio Taniguchi pour son siège historique sur la 53e Rue. En prévision, le département des Peintures et des Sculptures s’est agrandi et s’apprête à raccrocher l’une des plus belles collections d’art moderne au monde.
Le conservateur en chef, John Elderfield, qui a succédé à feu Kirk Varnedoe en mars, a nommé Ann Temkin et Joachim Pissarro aux postes de conservateurs aux côtés d’Anne Umland, promue conservatrice en janvier 2003. Gary Garrells continue à occuper le double poste de conservateur des peintures et sculptures et de conservateur en chef des dessins, et Kynaston McShine devient conservateur en chef du musée, un poste généraliste laissé vacant par John Elderfield.
Joachim Pissarro, l’arrière-petit-fils du peintre impressionniste, a fait ses armes dans les années 1990 au poste de conservateur au Kimbell Art Museum à Fort Worth (Texas), et à la Yale University Art Gallery. Son catalogue raisonné des peintures de son illustre aïeul étant quasiment achevé et son livre sur Jasper Johns et Robert Rauschenberg à paraître, il travaille aujourd’hui sur le catalogue de Robert Motherwell pour la Dedalus Foundation créée par l’artiste.
Précédemment conservateur d’art moderne et contemporain au Philadelphia Museum of Art, Ann Temkin a participé à l’exposition des dessins de Joseph Beuys au MoMA en 1993, et a organisé des rétrospectives itinérantes de Constantin Brancusi, Alice Neal et Barnett Newman.
John Elderfield, la quatrième personne à diriger le département, travaille au musée depuis 1975. Il dit admirer la « pensée et les recherches innovantes » de ses nouveaux collègues. « N’importe qui peut accrocher des tableaux sur les murs, assure-t-il. Le plus dur est de concevoir des expositions, faire les recherches et réfléchir aux artistes. [Les nouveaux conservateurs] sont tous les deux remarquables sur ces plans-là. » Il déclare aussi les avoir choisis pour la richesse de leurs centres d’intérêt.
John Elderfield a organisé le département en trois secteurs que chaque conservateur devra diriger pendant deux ans : Acquisitions, Recherche, et Accrochage. La première rotation voit Ann Temkin à la tête des Acquisitions et Joachim Pissarro à la Recherche. À l’Accrochage, Anne Umland poursuit son travail de réorganisation des 5 574 mètres carrés réservés à la collection permanente. Partageant ses activités avec le département des Dessins, Gary Garrels échappe aux responsabilités administratives, tandis que la conservatrice associée Cora Rosevear hérite de la gestion de la collection et des prêts.
Objectif principal de tout le département, la réinstallation de la collection permanente est une entreprise collective. Les bureaux temporaires du musée situés dans Queens réservent une salle à la maquette des futures galeries et des reproductions couleur des peintures et des sculptures du MoMA. « Nous avons déjà réalisé quelques ébauches et nous sommes arrivés à développer un accrochage général », explique John Elderfield. Ces plans diffèrent de ceux promis de longue date par le directeur Glenn D. Lowry, qui prévoyait un parcours principal chronologique où les salles permanentes dialogueraient avec les accrochages temporaires des salles adjacentes. Selon le conservateur en chef, des rotations auront lieu dans les espaces temporaires mais aussi dans les galeries permanentes.
Certains critiques craignent que l’estompage des distinctions entre les espaces centraux et ceux secondaires favorise un accrochage thématique mixte, aujourd’hui à la mode, aux dépens d’une approche historique de l’art moderne. Ann Temkin, ancienne responsable de l’accrochage de la collection du Philadelphia Museum of Art, soutient le contraire. L’objectif est de présenter un exposé équilibré du XXe siècle avec des mises en relief différentes. « Bien entendu, nous ne confinerons pas Les Demoiselles d’Avignon dans les réserves pendant un an, mais il y aura une plus grande flexibilité des œuvres présentées autour des Demoiselles. Nous opérons avec une certaine liberté qui se reflétera dans la présentation le jour du vernissage, mais aussi au cours des mois à venir. »
Les conservateurs gardent toutefois un œil critique sur la collection en vue de nouvelles acquisitions. Certains craignent que cet élan ne précipite l’« élagage » des réserves, mais Ann Temkin déclare ne pas être au courant d’un projet de deaccessioning (cession de collections). Le New York Times a néanmoins annoncé la vente récente de Maisons sur la colline, Horta de Ebro, de Pablo Picasso, au marchand berlinois Heinz Berggruen, et celle du Chien (1952), une huile de Francis Bacon, au galeriste londonien Gerard Faggionato. Ni ventes ni acquisitions n’ont été annoncées mais John Elderfield, qui travaille sur une rétrospective de l’artiste vénézuélien Armando Reverón, déclare avoir demandé à son équipe de revoir la collection d’art latino-américain afin d’en déterminer les forces et les faiblesses.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°181 du 21 novembre 2003, avec le titre suivant : Le nouveau MoMA se prépare en coulisse

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