Sept rouleaux de la mer Morte, prêtés par le Musée Rockefeller de Jérusalem ainsi que d’autres objets découverts près de Qumran, sont présentés à Glasgow jusqu’au 30 août, à l’occasion du cinquantième anniversaire de la création de l’État d’Israël. Découverts à la même époque, les précieux rouleaux se sont depuis irrémédiablement détériorés, victimes de négligences coupables.
LONDRES (de notre correspondant) - Découverts il y a seulement cinquante ans, les manuscrits de la mer Morte ont perdu une grande partie de leur lisibilité et posent de sérieux problèmes de conservation. “Depuis leur retrait des grottes qui les ont abrités pendant deux mille ans, ils se sont gravement détériorés”, reconnaît Ayala Sussman, spécialiste des manuscrits auprès du Service israélien des antiquités. Aussi incroyable que cela puisse nous paraître, c’est avec du Scotch que les chercheurs qui commençaient à reconstituer les textes dans les années cinquante ont réuni ces fragments anciens. Les taches et les traces d’adhésif sont aujourd’hui difficiles à éliminer. Des photographies d’époque nous donnent une autre preuve de la négligence des chercheurs : on les voit fumer en travaillant inconscients des dégâts que pouvaient provoquer la cendre, la fumée ou le feu. Jusqu’à une date récente, les manuscrits ont en outre été conservés dans du carton acide, avant d’être transférés dans des cartons d’archives. L’humidité, surtout dans les années cinquante, a également causé des dommages considérables. Lors de la réalisation de la Bibliothèque électronique des manuscrits de la mer Morte l’an dernier, il est en effet apparu que les clichés pris par les appareils les plus modernes n’étaient pas aussi bons que les anciennes photographies, pour la simple raison que les textes avaient pâli. La détérioration est telle que le cédérom a dû être basé sur les images des années cinquante.
Les spécialistes israéliens tendent à attribuer ces dégradations au séjour des manuscrits en Jordanie. Plus de 800 manuscrits et des dizaines de milliers de fragments ont été découverts entre 1947 et 1956 dans onze grottes de la région de Qumran – à cette époque située en Jordanie – et ont été achetés par le Musée Rockefeller de Jérusalem. Pendant la guerre de 1967, le musée est passé sous contrôle israélien et devenu propriété du Service israélien des antiquités, qui a beaucoup fait pour pallier aux problèmes de conservation. En dehors de quelques expositions à l’étranger, comme celle de Glasgow actuellement, les manuscrits sont toujours conservés au Musée Rockefeller. Par ailleurs, le Sanctuaire du Livre du Musée d’Israël, également à Jérusalem, conserve quelques-uns de ces documents, dont les sept manuscrits originaux découverts en 1947 et le manuscrit du Temple, acquis pendant la guerre de 1967. Ces derniers, trouvés relativement intacts, y sont exposés de façon permanente.
La publication des manuscrits a soulevé de vives controverses. Le travail a été très lent : en 1990, plus de quarante ans après leur découverte, seuls huit volumes des Découvertes dans le désert de Judée avaient été publiés. Finalement, en 1991, le secret qui entourait les manuscrits a été levé, par des reproductions photographiques non autorisées et des reconstitutions par ordinateur. Depuis, les autorités israéliennes ont fait accélérer le rythme des publications : quinze volumes supplémentaires viennent de paraître sous la direction du professeur Emmanuel Tov, et treize sont attendus d’ici 2001.
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Le Livre de sable
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°64 du 8 juillet 1998, avec le titre suivant : Le Livre de sable