Le ministre de la Culture a relancé son idée d’installer à Arles un centre patrimonial réunissant les archives historiques de la photographie. Si ce projet est accueilli avec bienveillance par les acteurs locaux, les chercheurs et donateurs potentiels lui préféreraient une implantation en banlieue parisienne, prévue pour 2011.
PARIS - Frédéric Mitterrand tente d’écrire l’épilogue d’un triste feuilleton. Le 25 mars, à l’occasion de la présentation à la presse de la 41e édition des Rencontres d’Arles photographie, le ministre de la Culture a confirmé une idée lancée le 11 juillet 2009. Fraîchement nommé, il avait alors fait part de son dessein de faire d’Arles une « référence mondiale pour la photographie » en y installant « un pôle patrimonial qui pourrait rassembler les archives des photographes qui ont construit l’histoire ». Huit mois plus tard, une « mission pour la photographie », placée directement sous son autorité et pilotée par deux fonctionnaires, Daniel Barroy et Manuel Bamberger, vient d’être mise sur pied.
Elle devra poursuivre le repérage des fonds constitués, proposer une « approche nationale et cohérente » de diffusion et de conservation, créer une commission des dons et legs, mais aussi mettre en œuvre une politique de diffusion numérique, financée via le grand emprunt.
La création d’un centre du patrimoine reste l’élément épineux. La mission dispose en effet d’un document de référence : le rapport que François Barré, ancien président des Rencontres, vient de remettre à André Schiavetti, maire d’Arles, et à ses partenaires locaux, publics et privés. Ce document constituerait, selon un proche du dossier, « la réponse d’Arles à la proposition du ministre ».
Il vise en réalité à poser les jalons d’un projet que la ville ne voudrait pas voir lui échapper. Car avant que l’État ne se décide à s’engager, la Fondation Luma, pilotée par Maja Hoffmann, héritière de l’empire pharmaceutique suisse Hoffmann-La Roche, et les collectivités locales avaient déjà lancé un vaste projet de « cité de l’image » sur une ancienne friche ferroviaire. Ces acteurs locaux peuvent donc se réjouir de l’arrivée d’une nouvelle institution nationale, qu’il faudrait néanmoins bâtir de toutes pièces, et dont le coût pour l’État viendrait s’ajouter à celui du transfert de l’École nationale supérieure de la photographie sur le site. Or un autre projet – nettement moins coûteux – est déjà sur les rails à Charenton-le-Pont (Val-de-Marne), au sein de la Médiathèque de l’architecture et du patrimoine, où les travaux devraient s’achever en 2011.
Ce programme était né d’une urgence : résoudre le problème inhérent à la dissolution – décidée en janvier 2004 par Jean-Jacques Aillagon, alors ministre de la Culture –, de l’association Patrimoine photographique, gestionnaire des fonds légués par les artistes ou leur famille à l’État.
Transféré au fort de Saint-Cyr (Yvelines), cet ensemble y a été conservé avec négligence, comme l’a confirmé une expertise judiciaire menée en 2006 à la suite d’une action de l’Association de défense des intérêts des donateurs et ayants droit du patrimoine photographique. « Je suis ravie de ces annonces, indique Françoise Denoyelle, sa présidente. Le ministre manifeste son intérêt pour la photographie, contrairement à ses prédécesseurs. Il laisse aussi entendre que l’État relance la politique des donations, car la collecte des fonds devient urgente. Mais j’attends de juger sur pièces. »
Car le projet arlésien, plus difficile d’accès pour les chercheurs qu’une implantation en région parisienne, pourrait ne pas satisfaire les futurs donateurs, dont l’assentiment est indispensable à l’enrichissement des collections publiques. Or le ministère de la Culture n’est pas toujours diligent à leur égard. Huit mois après la mort du photographe, le fonds Willy Ronis, versé à l’État, demeure inaccessible, compromettant ainsi plusieurs projets d’exposition prévus pour son centenaire, en septembre.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
L’Arlésienne photo
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°322 du 2 avril 2010, avec le titre suivant : L’Arlésienne photo