Une \"gestion prudente par prévoyance\" définit les grandes lignes de la politique d’Éliane de Wilde, le conservateur en chef des Musées royaux des beaux-arts de Bruxelles.
BRUXELLES (De notre correspondant) - À l’inverse du Cinquantenaire, les Musées royaux des beaux-arts de Belgique – qui regroupent en fait un seul musée doté de deux départements, l’un d’art ancien, l’autre d’art moderne et contemporain – jouissent de nouvelles salles depuis maintenant dix ans. La question du dépoussiérage d’un musée encore engoncé dans les normes du XIXe siècle a été l’œuvre de Philippe Roberts-Jones, le prédécesseur d’Éliane de Wilde qui préside aujourd’hui aux destinées de l’institution.
Les Musées royaux des beaux-arts occupent une position singulière en Belgique. Ils représentent, dans le domaine des arts plastiques, la dernière institution nationale du pays désormais fédéralisé. Ses collections font sa force. Concentrées sur l’art belge, elles n’en sont pas moins de réputation internationale dans le domaine de l’art ancien – riche aussi en peinture hollandaise – et du XIXe siècle.
Pour le XXe siècle, quelques ensembles, Delvaux et Magritte en tête, attirent un public nombreux quoique les collections restent d’inégale valeur. Aux faiblesses contemporaines, que l’on comble en profitant de la crise du marché de l’art, répondent les carences structurelles en tête desquelles doit être signalé le manque de personnel.
Attachés aux Musées royaux, le Musée Wiertz et celui de Constantin Meunier restent souvent fermés ; les salles de l’art ancien et de l’art moderne ferment en alternance et, le week-end, nombreux sont ceux qui, venus découvrir Khnopff, Meunier ou Ensor, se heurtent à des portes closes. L’insatisfaction croissante du public semble de peu de poids dans le bras de fer que les musées doivent livrer avec les administrations de tutelle, qui se refusent à donner les moyens nécessaires au fonctionnement de l’institution et ce, malgré un audit récemment réalisé par le bureau ABC du ministère de la Fonction publique.
Les subsides de la Loterie Nationale
L’autonomie de gestion, qui permet aux directeurs d’établissements scientifiques nationaux une plus grande marge de manœuvre, n’a pas réglé la question. Le poids de l’administration reste déterminant. Le Musée reçoit une dotation de quelque 95 millions de francs belges (environ 16,1 millions de francs français) pour ses frais de fonctionnement, hors charges salariales qui sont, elles, assurées par l’État. À cette somme, doivent s’ajouter les dons et les recettes propres – celles-ci, selon les années, représentent moins de 20 % du budget global –, sans oublier l’apport éventuel de la Loterie nationale négocié année par année. La liberté de gestion de ces fonds a surtout servi la politique d’achat. Le musée a pu enfin étoffer ses collections en complétant les 7 millions de francs belges de dotation pour les acquisitions, même si d’aucuns jugent sévèrement certains choix pratiqués.
Les travaux du bicentenaire
Éliane de Wilde a souvent été critiquée pour sa politique d’exposition, jugée trop prudente et trop étroitement limitée aux collections du musée. Manifestement, le conservateur en chef ne place pas les expositions en tête de ses priorités. Si son calendrier compte des titres jusqu’à l’aube du XXIe siècle – Les peintres hollandais en Belgique en 1995, Scutenaire et ses amis en 1996, Delvaux en 1997, Magritte en 1998 et Ensor en 1999 –, elle n’en affiche pas moins la certitude que d’ici peu, le musée n’organisera plus qu’une seule exposition par an.
En dehors des commémorations fastidieuses, le programme est dicté par un désir de valorisation des collections. Tel est le cas de "De Vouet à David", qui présente actuellement un ensemble de pièces issues des collections, retraçant l’évolution de la peinture française. Champaigne, Lorrain, Greuze, Robert sortent ainsi des réserves pour rejoindre le Marat assassiné de David, qui attire à lui seul un nombre important de visiteurs français.
Cependant, les Musées royaux viennent d’obtenir de la Régie des bâtiments la réalisation d’un série de travaux, qui permettront de doter l’institution en l’an 2001 d’une infrastructure rénovée : cafétéria, bureaux, centres d’études et nouvelles salles devraient être enfin à la hauteur des attentes d’une institution qui fêtera alors son bicentenaire.
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La gestion prudente des Musées royaux des beaux-arts
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°11 du 1 février 1995, avec le titre suivant : La gestion prudente des Musées royaux des beaux-arts