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ENTRETIEN

La directrice des musées du Vatican veut fidéliser le jeune public

VATICAN / ITALIE

Barbara Jatta est directrice des musées du Vatican. Née en 1962 à Rome, elle a mené des études de littérature puis d’histoire de l’art et d’administration des archives.

Barbara Jatta. © Alessandro Prinzivalle
Barbara Jatta.
© Alessandro Prinzivalle

En 1994, Barbara Jatta commence à enseigner l’histoire de l’art à l’université Sœur-Ursule-Benincasa à Naples. Deux ans plus tard elle rejoint la bibliothèque apostolique du Vatican et prend la direction de ses musées le 1er janvier 2017.

Quel impact la pandémie a-t-elle eu sur les musées du Vatican ?

La période que nous venons de traverser a été particulièrement difficile, au-delà de la crainte pour la santé du millier de personnes environ qui travaillent pour les musées du Vatican, lesquels abritent un trésor de plus de 200 00 œuvres d’art. À l’inverse du Louvre qui, une fois fermé, n’a plus rouvert, nous avons alterné des périodes d’ouverture et de fermeture en raison du choix de les adapter à l’évolution de la situation épidémiologique. Nous avons néanmoins affronté de longues périodes de travail à distance avec l’obligation de développer notre présence sur les différentes plateformes numériques. Le public a été au rendez-vous puisque les visites virtuelles ont progressé de plus de 200 %. La chute des visites en présentiel a été de plus de 80 % sur un an, après des années de hausse constante, ce qui évidemment a provoqué une baisse désastreuse des ressources du musée.

Comment avez-vous mis à profit cette période ?

Cette année n’a pas été une année perdue. Nous avons pu nous concentrer sur les activités d’entretien des salles et de restauration des œuvres que nous avions des difficultés à mener en présence des traditionnels flux touristiques. Les Chambres de Raphaël ont ainsi retrouvé toute leur splendeur, en particulier la Chambre de Constantin, que nous venons tout juste de rouvrir au public. Un chantier qui a duré autant que la vie de Raphaël puisqu’il avait été inauguré à l’occasion du 500e anniversaire de sa naissance, en 1983, et qu’il s’achève à l’issue de la commémoration des 500 ans de sa mort. Sans oublier la restauration des retables et tapisseries de cet artiste. Mais nous avons également profité de nos salles vides pour améliorer le câblage informatique et l’ensemble des conditions de sécurité.

Ce que vous appelez le « smart musée » ?

Exactement. Grâce à une plateforme numérique nous pouvons opérer une gestion centralisée des salles où ont été installés des capteurs électroniques. Ceux-ci nous permettent de contrôler les flux de visiteurs, de régler les conditions atmosphériques pour la conservation des œuvres tout en rendant plus efficaces les systèmes de vidéosurveillance, d’alarme anti-incendie et d’évacuation. Une modernisation nécessaire mais complexe à mettre en œuvre avant la pandémie à cause du nombre important de touristes.

Qu’en est-il de votre politique d’acquisition et de prêt d’œuvres ?

Nous ne procédons qu’exceptionnellement à des acquisitions et nos collections continuent à être enrichies par des donations. Concernant les prêts, ils ont été suspendus dès le début de la pandémie. Nous avons fait une exception pour le Louvre en septembre 2020 avec une fresque de Melozzo da Forlì. Au début du grand confinement, en mars 2020, nous avions de nombreuses œuvres hors du musée. Elles ont peu à peu fait leur retour. Les prêts reprendront cette année mais avec parcimonie. Nous n’avons également pas encore prévu de grande exposition, pour des raisons de budget. L’un de nos espaces d’exposition, le « bras de Charlemagne », sera très prochainement utilisé comme centre de vaccination anti-Covid.

Quelles sont vos priorités ?

Repartir au plus vite avec une exigence absolue de sécurité sanitaire pour nos visiteurs. Le tourisme de masse ne reviendra pas dans les mêmes proportions que celles que nous connaissions avant la pandémie, j’en suis persuadée. Il faut donc s’adapter. Les flux ont été complètement inversés. La crise sanitaire a fait disparaître nos deux grands bassins de visiteurs qui étaient les États-Unis et l’Asie. Si, en 2019, 70 % des billets étaient vendus à des étrangers et 30 % à des Italiens, c’est aujourd’hui le contraire. Il faut également attirer de nouveaux publics. La grande majorité de nos visiteurs avaient plus de 45 ans. Grâce au travail effectué sur Instagram et YouTube ainsi qu’à la mise en place d’un tarif réduit pour les jeunes, nous avons assisté à un rajeunissement extraordinaire du public de moins 40 ans, qui a bondi de 200 % depuis l’été dernier. Le grand défi est dorénavant de le fidéliser.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°569 du 11 juin 2021, avec le titre suivant : Barbara Jatta, directrice des musées du Vatican : « Notre grand défi est de fidéliser le public jeune »

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