Deux tombes intactes de la fin de l’Antiquité, contenant un riche mobilier funéraire, ont été mises au jour au début de l’année à Naintré, dans la Vienne. Une étude scientifique systématique, rendue possible par leur excellent état de conservation, devrait permettre d’enrichir notablement la connaissance de cette époque de mutation.
NAINTRÉ - En décembre 1997, lors de l’extension d’une carrière de sable au lieu-dit Laumont, à Naintré (Vienne), une structure maçonnée profondément enterrée et contenant un sarcophage a été mise au jour. Aussitôt alerté, le service régional de l’archéologie a fait modifier le plan d’extraction, permettant ainsi la préservation de la tombe. La fouille, commencée le 26 janvier, a révélé l’existence d’un deuxième caveau accolé au premier. Chacune des deux tombes, destinées à des membres de l’aristocratie locale, contenait un sarcophage en pierre dénué de sculpture, dans lequel était enchâssé un cercueil en plomb. Mais “l’importance de la découverte tient à la richesse du mobilier funéraire et à son état de conservation”, explique Luc Bourgeois, conservateur de l’archéologie à la Drac Poitou-Charentes, chargé du département de la Vienne. Le dépôt du caveau nord est certainement le plus riche, puisqu’il comprenait plusieurs objets en bronze (bassin, anneaux, miroir, coupelles), en verre, et même en ivoire (tablette à écrire). Dans le cercueil en plomb, le corps d’une enfant de 10-12 ans était couvert de tissus et vêtements intacts, parmi lesquels figuraient un tissu de fil d’or et de la soie en quantité, dont la présence, révélée par les premières analyses, confirme l’existence d’échanges avec l’Orient, voire l’Extrême-Orient. Cette opulence contraste avec la modestie de la structure maçonnée, bâtie avec des matériaux de récupération, l’alliance du luxe et du bricolage étant caractéristique des sites du Bas-Empire (du IIIe au Ve siècle), période de crise économique chronique. Le caveau sud, où reposait le corps d’une femme adulte, n’a pas révélé un mobilier aussi abondant et bien conservé. Les tombes se trouvaient à proximité d’un habitat, mais celui-ci “était peut-être déjà abandonné au moment de l’inhumation”, affirme Luc Bourgeois.
Grâce à un environnement humide et frais, les matériaux organiques, nombreux, ont traversé les siècles, mais ils nécessitent aujourd’hui des mesures de conservation préventive assez draconiennes. Un laboratoire en atmosphère contrôlée (80 % d’humidité et une température de 5° C) est donc en cours d’installation à Poitiers. Plus de 1 000 prélèvements ont déjà été réalisés ; l’analyse des vestiges, nécessitant l’intervention conjuguée d’archéologues et d’anthropologues, devrait demander au moins deux ans de travail. Cette vaste étude permettra d’en savoir plus sur les défunts, mais aussi sur les pratiques funéraires et les échanges économiques à la fin de l’Antiquité.
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Deux riches tombes du Bas-Empire exhumées à Naintré
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°62 du 5 juin 1998, avec le titre suivant : Luxe et bricolage