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Constantin Permeke en ses murs à Jabbeke

Belgique

Après trois années de rénovation, le Musée Permeke a rouvert ses portes à Jabbeke, dans la maison où l’artiste a vécu et créé pendant plus de quarante ans.

Le musée Permeke à Jabbeke. © Permeke / Yvan Mahieu
Le musée Permeke à Jabbeke.
© Permeke / Yvan Mahieu

Jabbeke (Belgique). Constant Permeke (1886-1952) est un des artistes qui a le mieux représenté une certaine identité flamande. Ses sujets, paysans aux corps massifs, paysages au ciel gris et à la terre grasse et brune n’y sont certainement pas pour rien. Il fut une époque où tout intérieur cossu en Flandre se devait d’avoir son Permeke accroché au mur au-dessus du buffet. Le terme « expressionnisme flamand » qu’on lui a si souvent collé a été mis en avant dans les années 20 par la galerie bruxelloise Sélection afin de mieux le vendre à l’étranger, et notamment en France. Et c’est en 1921, qu’il y a fait sa première exposition, à la galerie parisienne La Licorne. Malgré quelques grandes rétrospectives à l’étranger, sa notoriété n’a pas vraiment dépassé les frontières de la Belgique. Aujourd’hui, 90 % des collectionneurs qui achètent du Permeke en maison de vente sont belges.

L’évolution de l’art de Permeke est liée à celle de l’art moderne de la première moitié du XXe siècle. Partageant pendant quelques années un atelier avec Léon Spilliaert et admirateur de James Ensor quand il habitait Ostende, il s’est ensuite lié à Gustave de Smet et Frits van den Berghe avec qui il a fait ses premières expositions à la galerie Sélection à Bruxelles. On observe dans sa peinture, des traces de fauvisme, d’expressionnisme et de cubisme. Pourtant sur le plan artistique, il a toujours suivi une voie singulière et personnelle, se méfiant des écoles et étiquettes. C’est pour la même raison qu’il a toujours refusé de signer un contrat d’exclusivité avec une galerie.

S’il faut tirer un fil rouge de toute son œuvre fort diverse, c’est dans son approche des corps et dans une recherche constante de la forme et des matières qu’on la trouve. Permeke est d’abord un peintre de l’intuition. Son expression vient de l’intérieur. « D’abord j’étais lié à la nature. Mais à la longue, j’ai ressenti la pure restitution comme tromperie. Peindre ce n’est pas dire ce que l’œil voit mais ce que voient le cœur et l’esprit », a-t-il déclaré. Sa période forte de créativité est celle des années 20. C’est à cette époque, en 1929, qu’il fera construire par son ami architecte, Pierre Vandervoort, une maison dans le style moderniste à Jabbeke, un village champêtre à une quinzaine de kilomètres de Bruges.

Un musée dans sa maison

À peine dix mois après son décès en 1952, ses proches accédaient à son souhait de faire de sa maison-atelier un musée consacré à son œuvre. Aujourd’hui posé entre route et champs, le musée ouvre à nouveau ses portes au public après trois années de rénovation. Dans la villa, les peintures accrochées dans son ancien atelier de peinture rappellent son attrait pour la forme et montre qu’il ne s’est pas cantonné à un style unique. On y voit, par exemple, un Nu rouge aux coups de pinceau expressifs et plein de force qui font vibrer la matière, ou encore un Nu jaune, proche de l’abstraction, ainsi qu’une marine. Un grand dessin d’une paysanne au corps massif est typique du style qui l’a popularisé. Il est dessiné avec un mélange d’huile, de fusain et de térébenthine qui témoigne de son goût pour l’expérimentation technique.

C’est en 1937 que Constant Permeke s’est mis à la sculpture. La presse de l’époque l’a comparé à Maillol et à Zadkine. Le jardin, avec sa pelouse à l’anglaise et son allée arborée et bordées de haies, restauré d’après les photos d’époque, accueille trois de ses grandes sculptures Niobé, Statue funéraire couchée et Marie-Lou.

C’est son atelier de sculpture qui a fait l’objet de la rénovation la plus importante pour en faire un espace d’expositions temporaires en lien avec Permeke. La première sélection rassemble une trentaine de toiles et dessins pour approcher la multiplicité de son travail. On trouve des mangeurs de patates, des marins, mais aussi un paysage irradié de lumière, des portraits ou des intérieurs avec une étonnante variété d’approches picturales.

S’il est un artiste profondément flamand, Permeke est aussi un artiste de son époque, ouvert aux innovations, et avant-garde de son temps.

Musée Permeke,
Gistelsteenweg 341, 8490 Jabbeke, Belgique, www.permekemuseum.be

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°635 du 7 juin 2024, avec le titre suivant : Constantin Permeke en ses murs à Jabbeke

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