L’abandon par François Pinault de son projet de musée sur l’île Seguin a déclenché depuis quelques semaines une campagne de presse incroyable en faveur de l’art contemporain. Chaînes de télévision nationales, radios, presse écrite ont fait leurs gros titres sur cette affaire en déplorant la fuite vers l’Italie de cette importante collection d’art contemporain, un art contemporain qu’ils ne cessent pourtant à longueur d’année de maltraiter ou d’ignorer. Que s’est-il donc passé ? La presse va-t-elle se déchaîner ainsi contre la prochaine remise en cause d’un centre d’art ou pour le prix Marcel-Duchamp ? Malgré tous nos espoirs, nous pouvons en douter. Il faut bien se résoudre à expliquer cette furie médiatique par la seule personnalité du « renonceur » et regretter encore un instant l’impact qu’aurait pu avoir la Fondation Pinault pour la perception dans notre pays de l’art contemporain. Pour le milliardaire lui-même, ne s’agissait-il pas d’ailleurs d’une composante du projet ? « Je rêvais alors d’un lieu où se comblerait la distance qui sépare trop souvent nos contemporains et l’art de leur temps », a-t-il écrit dans son point de vue du Monde publié le 10 mai. Mais l’emploi du passé traduit bien que ses ambitions ont changé. François Pinault a-t-il été lassé par les lenteurs administratives, comme essaie de nous le faire croire le quotidien Le Monde défendant numéro après numéro la position de son actionnaire ? A-t-il dérouté son navire amiral pour d’autres raisons moins avouables publiquement ? Toujours est-il que le Palazzo Grassi ne sera prêt à accueillir dignement sa collection qu’en 2008, année où le musée de l’île Seguin devait être inauguré !
On pourra encore s’interroger sur les motivations qui ont conduit un homme, Jean-Jacques Aillagon, qui a accompli quand il était ministre de la Culture la plus importante réforme en faveur du mécénat depuis des décennies, à favoriser l’exil de l’une des plus remarquables collections privées françaises d’art contemporain. Mais peut-être, finalement, n’est-il pas question de mécénat dans cette affaire…
Après cette défaite pour l’art dans notre pays, et l’indigence de la représentation française à la Biennale de Venise, le moment est sûrement venu de lancer en France de nouveaux états généraux pour les arts plastiques. L’avenir de nos artistes en dépend.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Tempête médiatique
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°216 du 27 mai 2005, avec le titre suivant : Tempête médiatique