Relais - Hasard du calendrier, deux poids lourds de la sculpture se retrouvent actuellement exposés en France : Thomas Schütte et Thomas Houseago. Le premier est allemand ; né en 1954, il a été l’élève de Gerhard Richter, à Düsseldorf. Le second est britannique ; né en 1972, il a étudié à la prestigieuse Central Saint Martins College of Art and Design à Londres. Thomas Schütte investit, jusqu’au 16 juin, les splendides salons de la Monnaie de Paris, institution qui, exposition après exposition, s’impose par l’originalité de sa programmation. L’autre Thomas, lui, est à l’affiche du Musée d’art moderne de la Ville de Paris, jusqu’au 14 juillet. Deux sculpteurs, deux rétrospectives pour ce qui ne ressemble pas à un duel, les deux hommes étant amis. La veille de son vernissage, Thomas Houseago n’a d’ailleurs pas manqué de visiter la rétrospective de son aîné, emmenant avec lui son copain Brad Pitt, venu spécialement à Paris voir son exposition. Cette visite n’a rien d’étonnant. Schütte et Houseago ont de fait bien des points communs : le goût pour la figure humaine, pour les sujets traditionnels (le nu, le masque, etc.) et les matériaux classiques de la sculpture (le bronze, le plâtre…), sans oublier la monumentalité. Mais pas seulement : les deux sculpteurs partagent un même intérêt pour l’histoire de leur art, dans la continuité de laquelle ils s’inscrivent. Comment, en effet, ne pas être frappé par les fantômes qui hantent les deux expositions ? Celui de Picasso, génial assembleur, chez Houseago ; celui de Daumier et de ses bustes-charges chez Schütte. L’ombre de Brancusi plane, elle aussi, au-dessus des œuvres du Britannique, lorsque celui-ci accorde autant d’importance à ses socles qu’à sa sculpture proprement dite. Chez Schütte et Houseago, il y a du Degas dans la recherche du mouvement et du Rodin dans la manière d’insuffler vie à la matière. « Toute l’histoire est mixée, retravaillée par Schütte », remarque Camille Morineau, commissaire de l’exposition de la Monnaie, propos qui conviendraient également au travail d’Houseago… Pourquoi toutes ces références à l’histoire de la sculpture ? Nous avons posé la question à Thomas Houseago : « La sculpture est un art difficile. C’est pour cela qu’il y a si peu de sculpteurs, nous a répondu l’artiste. Depuis Lorenzo Ghiberti, c’est un peu comme si nous nous passions le relais, de main en main… » Le Musée d’art moderne de la Ville de Paris opère un subtil rapprochement entre L’Homme pressé (2010-2011), mastodonte en bronze de plusieurs mètres d’Houseago, et le bas-relief d’Alfred Janniot, visible à travers la baie vitrée, destiné à décorer le Palais de Tokyo construit en 1937 pour l’Exposition internationale. Le titre de cette sculpture : Allégorie à la gloire des arts. Un passage de relais qui ne pouvait que séduire Thomas Houseago…
Râlant - Pour la Saint-Valentin, la mairie de Paris a offert un cœur monumental aux Parisiens. Son titre : Cœur de Paris. Culminant à plus de 9 m de hauteur, il est signé Joana Vasconcelos. Problème, tout le monde ne semble pas sensible à cette déclaration d’amour. En cause : l’esthétique clinquante du cœur et, surtout, son coût. « À l’heure où l’on explique aux contribuables qu’il faut se serrer la ceinture, Paris dépense 650 000 euros pour installer un gros cœur ! », s’insurge la twittosphère. Côté esthétique, il faut bien admettre que cette énorme pomme d’amour scintillante plantée au beau milieu de la porte de Clignancourt n’est pas la plus réussie de l’artiste portugaise, que l’on a connue plus inspirée. Côté financement, 650 000 euros représentent en effet, dans le contexte actuel, une somme importante pour le service public, même pour une œuvre monumentale recouverte de plus de 3 000 azulejos réalisés par des artisans portugais. Pourtant, cela reste bien loin des prix stratosphériques atteints parfois par l’art contemporain, par exemple les 3,5 millions d’euros nécessaires à la réalisation du Bouquet de tulipes de Jeff Koons, dernière polémique parisienne en date. La ville jurait avoir trouvé un moyen innovant pour éviter toute nouvelle controverse, en faisant notamment participer les habitants et les associations du quartier au choix de l’œuvre à travers l’action, vertueuse, des Nouveaux commanditaires. Cela n’a visiblement pas suffi. Comme il n’a pas suffi de choisir deux designers à la reconnaissance internationale, les frères Bouroullec, pour réaliser les nouvelles fontaines des Champs-Élysées, dont l’aspect « douche » est moqué sur les réseaux sociaux. En 2018, la mairie de Paris a lancé « embellir.paris ». Objectif de l’opération : revaloriser vingt sites « délaissés » dans la capitale par une intervention artistique ou culturelle. Pour cela, la Ville a lancé un appel à projets ouvert à tous (artistes, architectes, designers…), dont les lauréats ont été désignés, à la fin du mois de mars, par un jury réunissant des habitants, des personnalités des arrondissements et des acteurs du monde de l’art. Paris a-t-elle ainsi trouvé la bonne formule qui coupera court à toutes les futures critiques ? Réponse à la prochaine polémique…
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Relais Râlant
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°722 du 1 avril 2019, avec le titre suivant : Relais Râlant