Jusqu’où s’étend la liberté des artistes ? Cette question revient de façon cyclique au cœur du débat. Régulièrement, artistes et commissaires d’exposition sont confrontés à ce qu’il n’est pas déplacé de nommer de la censure, parce que ses multiples formes, de l’intimidation à l’interdiction pure et simple, masquent une même sémantique. L’actualité nous rappelle que pour un artiste il est toujours aussi difficile de détenir à la fois un contrôle sur son processus de création et sur la diffusion de son œuvre. Ironiquement, les deux affaires qui nous occupent aujourd’hui concernent les États-Unis d’un côté, la Russie de l’autre. Dans les deux cas, la liberté des artistes a été bafouée. La première histoire concerne le différend qui a opposé Christoph Büchel au Massachusetts Museum of Contemporary Art (Mass MoCA), à North Adams. Après avoir travaillé à une gigantesque installation, le Suisse l’avait finalement abandonnée à la suite d’un désaccord avec l’institution, laissant derrière lui un immense chantier. Le musée avait décidé malgré tout d’ouvrir l’exposition au public. Saisie par Büchel, la justice américaine a tranché en faveur du Mass MoCA, en précisant que rien dans le système de protection du droit d’auteur aux États-Unis n’empêchait l’institution de le faire. La seconde affaire est liée à l’exposition « Sots Art - Art politique en Russie depuis 1972 », qui s’ouvre le 21 octobre à la bien nommée Maison rouge, à Paris. Parmi les œuvres sélectionnées, les autorités russes ont bloqué dix-neuf pièces. Une photographie montrant deux militaires en train de s’embrasser par les Blue Noses ou une autre figurant l’artiste Vlad Monroe en Hitler ne seront pas accrochées aux cimaises de la Fondation Antoine de Galbert, car jugées honteuses par les autorités.
En France, ce débat a été alimenté cet été par le geste inconsidéré de l’artiste Rindy Sam à l’encontre d’une œuvre de Cy Twombly. Loin du baiser de l’artiste cher à Orlan, celui de la jeune Cambodgienne lui a valu de comparaître le 9 octobre devant le tribunal d’Avignon, qui a mis son jugement en délibéré au 16 novembre. Si Twombly n’a demandé qu’un euro de dommages et intérêts, Yvon Lambert, propriétaire de l’œuvre, a pour sa part chiffré son préjudice moral à deux millions d’euros ! Après la censure, la sangsue ?
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Liberté chérie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°267 du 19 octobre 2007, avec le titre suivant : Liberté chérie