Au Salon de 1850-1851, Courbet envoie neuf tableaux dont Un enterrement à Ornans qui signale la révolte du réalisme face aux excès du néoclassicisme et du romantisme. Le tableau fait scandale. On lui reproche, pêle-mêle, la trivialité du sujet, un grand format normalement réservé à la peinture d’histoire, ou encore un style âpre et peu séducteur. Le réalisme va alors être la tête de pont de la modernité face à l’académisme.
Cent cinquante ans plus tard, les rôles sont inversés. En dépit d’une prodigieuse diversité, l’art actuel abrite en son sein un courant dominant qui se mobilise pour raconter la réalité du monde. Les griefs d’hier sont les modèles d’aujourd’hui. Les artistes ont relégué au placard les gentils paysages impressionnistes et puisent leurs sujets dans les malheurs du monde (lire l’éditorial de septembre 2007). Plus que Courbet, dont on surestime trop souvent la charge critique des tableaux réalistes, ces artistes dénoncent les maux et travers de notre société.
Et pour bien appuyer leur propos, ils n’hésitent pas à s’approprier le registre du gigantisme et à concevoir des installations parfois démesurées, en tout cas bien loin des petits tableaux de chevalet. En revanche, à l’instar du maître d’Ornans, il en va souvent d’une volonté de choquer le spectateur. Les moyens employés présentent deux versants opposés mais tout aussi rudes. Un versant hyperréaliste que l’on retrouve dans les sculptures en résine d’un Ron Mueck par exemple, et un versant « détritus », qui à la suite de Schwitters ou plus tard des Nouveaux Réalistes, n’hésite pas à employer les matériaux les plus prosaïques.
Il n’est ainsi pas abusif de rapprocher tout ce courant de la création contemporaine, du réalisme dans lequel il semble s’inscrire. De même n’est-il pas illégitime d’affirmer que ces travaux qui bénéficient de l’appui des écoles d’art, de la critique, des institutions et d’une partie du marché s’érigent en norme de la création, marginalisant tout ce qui ne leur ressortit pas. La définition même de l’académisme.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Le réalisme, ce nouvel académisme
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°596 du 1 novembre 2007, avec le titre suivant : Le réalisme, ce nouvel académisme