Désir d’histoire

L’événement n’est pas l’histoire, dit-on, voulant exprimer par là que le recul du temps est nécessaire pour écrire le grand récit du monde. Les attentats qui ont meurtri Paris vendredi 13 novembre ne sont malheureusement ni les premiers ni les seuls dans le monde. Mais leur répétition interroge l’historien. Comme la présence de Français parmi les assassins interroge notre modèle de société que l’on voudrait exporter. S’agit-il d’une simple péripétie de l’histoire contemporaine ou d’une nouvelle guerre de trente ans contre un nouveau totalitarisme ? La « fin de l’histoire » théorisée par Francis Fukuyama n’est-elle pas seulement la fin d’un épisode de l’histoire ? Après l’émotion légitime qui s’est emparée de tous et que l’on veut canaliser en se rassemblant, viendra le moment de la réflexion calme et raisonnée, en dépit des inévitables prochains attentats. C’est précisément ce qu’aurait permis une Maison de l’histoire de France si, profitant de son instrumentalisation par des naïfs ou des hypocrites au motif que c’était un projet Sarkozy, Aurélie Filippetti ne l’avait enterrée pour des raisons en réalité économiques. Quel penseur de bonne foi pouvait un instant imaginer que l’État allait imposer sa lecture de l’histoire dans cette maison-musée ? La galerie des Batailles de Versailles, le Musée de l’armée, les musées de société, le Musée de l’homme offrent chacun un regard fractionné sur l’histoire. Il manque un lieu d’exposition, de conférences, de débats, un lieu qui, avec toute la rigueur scientifique, puisse éclairer nos concitoyens, parfois en opposant des points de vue, sur la marche du monde dans son ensemble afin de comprendre d’où il vient et imaginer où il va. Un lieu qui offre à ses visiteurs quelque chose qui les transcende et les fasse réfléchir, car répondre #Parisestunefête, à #djihad, c’est bien, mais un peu court.