CULTURE SOCIALE. « Peut-être que je vais prendre ma retraite. Je crois que c’est le bon moment », confie Maurizio Cattelan à Catherine Grenier à la fin de leur conversation publiée au Seuil [Le Saut dans le vide, 162 p., 18 e]. Né en 1960 à Padoue, le trublion italien s’apprêterait donc à faire valoir ses droits, à raccrocher les gants comme il vient de le faire avec ses œuvres, suspendues dans le vide du Guggenheim de New York, pour son ultime rétrospective… Cattelan à la retraite ! Mais imagine-t-on Matisse mettant au placard ses pinceaux pour se consacrer à la culture potagère ? Ou Picasso battant les cartes avec ses « vieux » copains de résidence de fin de vie ? Pourtant, l’annonce de Cattelan n’a choqué personne. C’est que l’artiste est bénéficiaire, comme tout travailleur indépendant en France, du régime de base de l’assurance retraite depuis 1952, ainsi que du régime complémentaire de l’Ircec. Les plasticiens eux aussi doivent cotiser un minimum de 163 trimestres pour assurer, à taux plein, leurs vieux jours. Comment pourrait-il en être autrement d’ailleurs ? Mais c’est aussi que l’artiste possède désormais un véritable statut au sein de la société avec des écoles, des filières, des étapes de carrière (l’émergence, le mid-career et la maturité) et des protections sociales, si éloignées de l’image romantique que l’on se fait traditionnellement de cet être libre vivant à la marge de tout système… Que l’on se rassure, le futur jeune retraité de 51 ans ajoute un peu plus loin : « Je ne dis pas que désormais je ne ferai plus rien du tout, seulement, ce sera différent. » Ouf ! La nouvelle du départ à la retraite n’est donc très probablement qu’une énième provocation de la part de Maurizio Cattelan. Et les apparences d’être sauves…
CULTURE NATIONALE. Vraiment sauves ? On peut s’interroger quand les artistes voient, depuis plusieurs mois, leur demande de visa de travail temporaire se compliquer à l’extrême dès lors qu’ils veulent réaliser un projet en Grande-Bretagne. La faute à ces « temps de tensions économiques et sécuritaires », dit un article du New York Times repris par Courrier international, qui ont incité le gouvernement britannique à durcir son protectionnisme culturel. Ainsi est-il devenu difficile pour un plasticien, comme pour un acteur ou un musicien, de montrer patte blanche pour venir réactiver une œuvre lors d’une exposition, réaliser une performance ou simplement donner une conférence au royaume de Sa Majesté. Au moins Maurizio Cattelan, passé du statut d’artiste à celui de touriste à la retraite, ne se verra-t-il pas refoulé aux frontières de la perfide Albion…
CULTURE GENERALE. Dans un pamphlet intitulé Liliane est au lycée – jeu de mots autour de L’Iliade et L’Odyssée –, Normand Baillargeon, professeur de philosophie à l’université du Québec, écrit à propos de la France : « Il y a peu de pays où le péché de carence de culture générale suscite d’aussi nombreuses et virulentes réactions, allant de l’hilarité […] à l’indignation » [Flammarion, 130 p., 8 e]. Si l’auteur suspecte la culture générale de porter en elle les marques de l’exclusion, du sexisme, de l’élitisme et de l’occidentalisme, il regrette de la savoir cantonnée aux seuls territoires de la pensée et de la littérature. Car, demande-t-il, qu’est-ce qu’une culture générale qui oublierait l’art, les sciences, la morale, les religions ou la philosophie ? C’est parce qu’il a fait de cette question sa ligne éditoriale que L’œil s’attache à vous emmener chaque mois hors des frontières des seuls beaux-arts, comme ce mois-ci en allant voir du côté de la littérature, des mathématiques, de l’histoire, de la diplomatie culturelle, du cinéma… L’occasion de vous souhaiter une bonne lecture et de vous présenter, chers lecteurs, au nom de la rédaction, tous mes vœux de culture pour 2012.
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Culture sociale. Culture nationale. Culture générale
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°642 du 1 janvier 2012, avec le titre suivant : Culture sociale. Culture nationale. Culture générale