Cock-a-doodle-doo. Mais quel est donc ce coq gaulois qui ose tenir « crête » à lord Nelson, grand héros britannique qui a bataillé contre les Français au large du cap de Trafalgar en 1805 ? Il est l’œuvre de Katharina Fritsch. Ce drôle d’oiseau bleu de plus de quatre mètres a été choisi par la commission qui s’occupe, depuis 1998, de sélectionner les œuvres contemporaines destinées à prendre place, temporairement, sur Trafalgar Square, à Londres. Il devrait être installé en juillet si, d’ici à son érection, la controverse n’a pas raison du gallinacé en fibre de verre. Car, outre-Manche, tout le monde ne goûte pas la malice de l’artiste. Il faut bien reconnaître avec les Anglais que la commission, chargée d’orner le socle de la place resté vide depuis près de cent cinquante ans, s’illustre par son goût pour la provocation. On se souvient, en 2005, de la sculpture de Marc Quinn représentant une jeune femme enceinte handicapée (Alison Lapper). Mais dresser un coq, symbole de l’adversaire tricolore, face à la colonne et à la statue du vice-amiral qui, s’il a remporté la bataille, fut fauché par une balle… française, cette fois, c’en est trop. Please, veuillez ôter l’animal de la vue de l’amiral ! Car on ne touche pas impunément à l’histoire d’une nation. La France le sait bien, qui vient d’essuyer une polémique avec son voisin allemand à propos de son exposition « De l’Allemagne », au Louvre. Mais ni Katharina Fritsch ni la commission anglaise ne s’en émeuvent. Le devraient-ils ? Un coup de Trafalgar porté aux Britanniques à l’aide d’un cock-a-doodle-doo (« cocorico » dans la langue de Molière) bleu de France par une artiste… allemande, c’est tout de même un comble.
Cocorico, les Frac ont 30 ans ! Cette invention française, née en 1982-1983 de la volonté politique d’irriguer le territoire en art contemporain, fête ses trois décennies d’une réussite. Un anniversaire qui n’est pas sans réveiller, au sein des Frac et autour, des inquiétudes, ni sans soulever des questions. Car, avec l’âge, ces structures initialement légères se sont, pour certaines, quelque peu empâtées. Certains Frac, dits de « deuxième génération », se sont lestés du poids de leur nouveau bâtiment signé d’un grand architecte international (Kengo Kuma pour les Frac Franche-Comté et PACA, Jakob MacFarlane pour le Frac Centre…). Quand les vingt-trois Fonds régionaux se sont alourdis de collections devenues, au fil des ans, encombrantes ; il faut les stocker, les faire circuler, les restaurer, etc. Si tous souhaitent conserver leur esprit militant fondateur, tous sont conscients du risque qui les menace : la patrimonialisation de leur collection. Les Frac deviendront-ils des musées ? Pourront-ils longtemps considérer leurs collections autrement que comme des collections historiques ? Autrement dit, sauront-ils rester contemporains ? Ce sont quelques-unes des questions auxquelles les Frac devront répondre dans la prochaine décennie avec, pour toile de fond, la problématique centrale du devenir de leurs collections. Les Fonds régionaux ne devront-ils pas un jour transférer leurs œuvres à d’autres structures, voire les remettre sur le marché, pour retrouver leur « légèreté » d’intervention ? Il se pourrait bien que le sujet de l’inaliénabilité des collections reconduit à la porte des musées revienne cette fois par la fenêtre des Frac.
Chant du cygne, en revanche, pour le Centre Pompidou mobile (CPm), qui plante pour la dernière fois sa tente à Aubagne cet été. La structure itinérante dessinée par Patrick Bouchain, fierté du président du Centre Pompidou, est finalement trop lourde à financer. Qui l’eût cru ? Faut-il pour autant crier à l’échec du CPm ? Pas à Libourne, où le maire PS, Philippe Buisson, confie que ce « barnum » muséal a su doter sa petite ville du Sud-Ouest d’une ambition d’art contemporain. Le CPm est mort ? Vive le CPm !
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Cock-a-doodle-doo, cocorico et chant du cygne
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°659 du 1 juillet 2013, avec le titre suivant : Cock-a-doodle-doo, cocorico et chant du cygne