CAPITAL. Avec « Marseille-Provence 2013 », Marseille voit enfin l’opportunité de dévoiler un visage qu’on ne lui connaissait pas – ou plus – de grande cité culturelle. Pour qui n’a pas récemment mis les pieds dans la cité phocéenne, il est difficile d’imaginer combien la ville s’est métamorphosée : nouveau front de mer (depuis le port jusqu’aux docks), nouveaux musées, équipements remis à neuf, nouvelles – sur le papier du moins – ambitions… En réalité, MP 2013 cueille les fruits de plusieurs initiatives lancées indépendamment de la candidature en 2008 de la ville au titre de capitale européenne de la culture : l’aboutissement du projet EuroMéditerranée, ce vaste chantier de rénovation urbaine – « le plus grand d’Europe », dit-on – impulsé par l’État en 1995 afin de donner à la ville un rang de métropole économique internationale ; la construction du MuCEM, le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, né de la décision en 1997 de transférer l’ancien Musée des ATP de Paris à Marseille ; et le plan d’investissement pour les musées en région initié par le ministère de la Culture en 2010 qui a permis de rénover des institutions vieillissantes. Résultat, Gyptis et Protis eux-mêmes peineraient à reconnaître la cité qu’ils ont fondée, devenue en quelques années le terrain de jeu des plus grands architectes mondiaux : Norman Foster, Rudy Ricciotti, Kengo Kuma, Zaha Hadid, Massimiliano Fuksas, Jean Nouvel… Malheureusement, comme souvent dans la deuxième ville de France, cette opération ne s’est pas effectuée sans douleur. Que l’on se remémore les incessantes grognes locales et autres chamailleries politiques : Toulon quittant le navire MP 2013, les intellectuels s’enchaînant place de la Bastille pour protester contre le détournement de subventions, le directeur général de l’association MP 2013 (Bernard Latarjet) jetant l’éponge, le président PS du conseil général des Bouches-du-Rhône (Jean-Noël Guérini) menaçant de retirer ses subsides, les multiples reports du MuCEM, l’annulation de l’exposition Albert Camus, etc. Autant de raffuts que même le concert de tractopelles sur les chantiers n’a pas réussi à couvrir. Est-ce pour cela que toute la ville a communié d’une seule voix, le 12 janvier dernier, lors de la « grande clameur » inaugurale de MP 2013 ? S’agissait-il pour les organisateurs des festivités d’un exutoire ? Une chose est certaine, Marseille dispose désormais d’une année, et pas une de plus, pour convaincre. Pour faire parler d’elle en bien et récolter le bon jus de Marseille-Provence 2013. Pour « faire du bruit », positif cette fois. C’est capital pour la ville.
CAPITALE. Chaque année en janvier, parfois même avant, c’est la course aux grands musées parisiens qui communiqueront les premiers leurs chiffres de fréquentation pour l’année révolue. « 2012 a battu des records : le Louvre a doublé ses entrées en cinq ans, le Musée d’Orsay a battu son record depuis [son ouverture] », annonçait le 5 janvier le JT de TF1 avant de se risquer à cette analyse : « La culture se porte bien. » Certes, les chiffres sont impressionnants : 10 millions de visiteurs au Louvre en 2012( 10 % par rapport à 2011), 3,8 millions à Beaubourg ( 5,5 %), 3,6 millions à Orsay ( 15 %)… Mais ces résultats masquent une réalité plus contrastée ailleurs, où la fréquentation annuelle équivaut, dans le meilleur des cas, à la fréquentation d’une seule exposition parisienne. Si 495 000 personnes ont ainsi visité « Matisse » au Mnam, elles étaient près de 475 000 pour voir toutes les expositions du Centre Pompidou-Metz. En régions, le succès d’une exposition flirte avec les 100 000 visiteurs. Cela semble peu au regard d’un blockbuster parisien ; c’est en réalité une belle réussite. D’autant plus belle que, programmées à Paris, certaines de ces expositions battraient elles-aussi des records. Combien de visiteurs les expositions « Caravage » (280 000 visiteurs, à Montpellier et Toulouse) ou « 1917 » (220 000, à Metz) auraient-elles accueilli si elles avaient été programmées au Grand Palais ? Probablement autant que Hopper, prochain record de la capitale.
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Capital - Capitale
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°654 du 1 février 2013, avec le titre suivant : Capital - Capitale