« Lorsqu’une maison de ventes fait un record, elle le claironne partout, mais quand c’est un antiquaire, il s’en cache. Voilà le drame de notre métier », me disait récemment un antiquaire. Au moment où la Biennale des antiquaires ouvre ses portes, les griefs des marchands à l’égard des auctioneers s’expriment de plus en plus : lettres ouvertes, publicité comparative, assignation devant les tribunaux. Le paradoxe, dans cette histoire, est que les marchands sont bien souvent les premiers clients, vendeurs ou acheteurs, des maisons de ventes. C’est que la concurrence se tend entre les deux professions. À l’exception des galeries d’art contemporain, car les enchères ne s’intéressent qu’au second marché, les pièces qui ont déjà circulé et donc les artistes connus ou les objets d’antiquaires.
La profession subit un bouleversement écologique : la matière première que sont les marchandises se raréfie. Les pièces de qualité, inédites sont en voie de disparition. Le marché de l’art tend à fonctionner en circuit fermé. Or de ce point de vue, les grandes maisons de ventes disposent d’un avantage considérable : un fichier de dizaines de milliers de clients internationaux, parfaitement renseigné sur leurs goûts et acquisitions, pour la bonne raison que ce sont elles qui leur ont vendu les pièces. Christie’s et Sotheby’s sont en train de s’organiser pour mettre en relation vendeurs et acheteurs, sans passer par le feu des enchères, empiétant sur le terrain des marchands. Si la vente de gré à gré est autorisée à Londres ou à New York, elle ne l’est pas encore en France. Mais une proposition de loi allant dans ce sens est dans les tuyaux parlementaires depuis plusieurs mois.
La partie n’est pas finie pour les antiquaires, même si le nombre de marchands d’art moderne ou de mobilier XVIIIe a fortement diminué. Ils disposent encore de nombreux atouts. Ils sont mieux organisés pour dénicher les petites « adresses », ces particuliers qui détiennent de belles pièces inconnues. Leurs cycles de ventes sont en continu, avec des espaces permanents d’exposition, alors que les maisons de ventes fonctionnent avec deux ou au maximum trois sessions thématiques par an. Ils peuvent apporter l’objet désiré dans la résidence de l’acheteur potentiel pour qu’il puisse l’apprécier in situ. De manière générale, ils offrent un service plus personnalisé. En outre, Internet permet de rebattre les cartes en offrant aux deux canaux de distribution un accès instantané aux collectionneurs du monde entier. Encore faut-il que les marchands s’approprient l’outil. De même, leur déficit en communication n’est pas structurel. Avec un peu de bonne volonté et de bon sens, les antiquaires français pourraient (enfin) développer leur marketing. En ce sens, la Biennale des antiquaires est une formidable caisse de résonance.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Antiquaires et SVV
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°627 du 1 septembre 2010, avec le titre suivant : Antiquaires et SVV