Deux économistes suisses viennent de proposer un mode original de tarification des billets d’entrée dans les musées : un prix au temps passé. Dans la pratique, comme dans un parking, une horloge enregistrerait l’heure d’entrée et de sortie du visiteur qui paierait en partant. À partir de cette idée simple, les deux universitaires ont élaboré toute une série de variantes et d’adaptations. L’idée paraît loufoque de prime abord et l’on imagine aisément toutes les difficultés que cela soulève. Au mieux elle incite les visiteurs à accélérer le tempo, au pire elle peut créer des tensions, de l’exaspération chez les « consommateurs » ralentis par n’importe quel incident qui alourdit le prix.
Cette brève aurait pu rester dans la rubrique insolite si elle ne mettait pas le doigt sur le casse-tête de la tarification, surtout en période estivale. En effet, comment maximiser les recettes des 22,2 millions de touristes étrangers, des clients captifs, qui forment plus de 57 % des entrées dans nos musées, selon la 7e édition du Palmarès Artclair des musées ? Une double tarification touristes/ locaux étant interdite, les élus doivent arbitrer entre un manque à gagner sur les recettes des touristes ou le mécontentement de leurs administrés.
Voilà pourquoi la gratuité, cette fausse bonne idée, est en train de perdre du terrain. À la Mairie de Paris, où les musées municipaux enregistrent en 2009 une baisse des entrées dans les collections permanentes de près de 12 %, elles sont pourtant gratuites, on prend conscience de la situation. Le maire ne reviendra pas sur une mesure très symbolique, mais il veut mettre en place des actions de médiation auprès des populations intimidées par le musée. Philippe Duron, le maire PS de Caen, a moins d’états d’âme : il va supprimer la gratuité instaurée par son prédécesseur en 2005 et utiliser les recettes nouvelles pour aller chercher physiquement de nouveaux publics. Au plan national, l’engagement de campagne du candidat Sarkozy a été très vite enterré après une expérimentation en 2008, remplacée par la gratuité pour les moins de 26 ans. Sitôt arrivé, Frédéric Mitterrand a étendu cette mesure aux jeunes de l’Union européenne. C’est d’ailleurs l’une des rares mesures concrètes du ministre au bout d’un an d’activité.
Le panier moyen est de 7 euros si on le rapporte à tous les visiteurs et d’un peu plus de 11 euros si on ne prend en compte que les visiteurs payants. C’est un montant plutôt élevé et qui montre que le public est prêt à consommer des produits et services supplémentaires (audioguides, conférences, livres…) pour peu qu’ils soient de qualité et bien mis en avant. Comme devrait être proposée systématiquement à la caisse une carte annuelle permettant aux locaux de payer moins cher que les touristes.
Étoffer l’offre est autrement plus enthousiasmant que le très malthusien paiement à la consommation de nos deux amis suisses.
Éditeur et rédacteur en chef (jchrisc@artclair.com)
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Le juste prix
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°626 du 1 juillet 2010, avec le titre suivant : Le juste prix