Etude, A étudier

Par Fabien Simode · L'ŒIL

Le 16 janvier 2014 - 630 mots

ETUDES  L’étude sur l’apport de la culture à l’économie française, dont nous annoncions ici la publication le mois dernier, a été remise au gouvernement. Sans surprise, elle corrobore celle réalisée à la demande des sociétés d’auteurs, France créative, qui mettait en avant la place centrale du secteur culturel dans le rayonnement et la compétitivité du pays. Certes, les résultats diffèrent : si les branches culturelles emploient 670 000 personnes pour la première analyse, les emplois directs passent à plus de 1,1 million pour la seconde ; et quand le rapport remis au gouvernement parle de 3,2 % de « PIB culturel », France créative estime la part des industries culturelles dans le PIB à 2,8 %. Mais il n’est pas question de chicaner sur ces variations imputables aux différences de périmètre des études et aux données prises en compte (l’une parle de valeur ajoutée – 57,8 Mds € – quand l’autre regarde le chiffre d’affaires du secteur – 74,6 Mds €), mais d’enfoncer un peu plus le clou et de rappeler que si la culture élève les âmes et les esprits, elle est aussi un facteur d’emplois et de création de richesses pour notre pays. Car si lesdits rapports sont éloquents sur le sujet, celui remis au ministère de la Culture pointe néanmoins la diminution, depuis 2005, de la part des activités culturelles dans la valeur ajoutée nationale, au moment où elle devrait au contraire augmenter.  Nos décideurs ne doivent donc pas se satisfaire de ces résultats, même positifs, ni réduire leurs ambitions culturelles – et celles de la France. Car ce que nous apprennent ces études, c’est que la culture, si elle a un coût, est un investissement qu’il faut protéger. Mieux, encourager ! À bon entendeur…


A ETUDIER L’art est depuis longtemps un outil diplomatique. Mais, avec la multiplication des années croisées et des célébrations transnationales, cette fonction prend aujourd’hui une ampleur sans précédent. Fin 2013, les diplomates américains ne proposaient-ils pas de restituer à l’Iran un objet de l’Antiquité perse, un griffon surmonté de trois coupes, pour symboliser le rapprochement des deux pays ? Quelques semaines plus tard, en France, le ministère des Affaires étrangères émettait le souhait d’offrir à la Chine la Liberté guidant le peuple le temps d’une exposition célébrant le cinquantenaire de la reconnaissance de la République populaire par le général de Gaulle, le 27 janvier 1964. La créature légendaire, mariage de l’aigle et du lion, a retrouvé la terre à laquelle elle avait été frauduleusement arrachée ; le tableau de Delacroix, trop fragile pour voyager, est quant à lui resté au Louvre, non sans avoir réveillé la polémique désormais récurrente sur les prêts et les mouvements d’œuvres d’art. Car ces derniers comportent toujours des risques : d’abord pour la sécurité des œuvres, ensuite pour l’attractivité des musées qui se séparent de leurs chefs-d’œuvre.

Dans l’interview qu’il accorde à L’Œil, Patrick de Carolis, le directeur du Musée Marmottan Monet, a raison de parler du nécessaire « équilibre » à trouver entre les intérêts de l’œuvre, du musée et des visiteurs. La solution est peut-être donc à chercher du côté de San Diego qui organise, jusqu’au 9 mars, une rétrospective exhaustive des cent vingt-trois peintures de Frida Kahlo. Pour réaliser un tel exploit, les organisateurs n’ont en effet pas hésité à présenter une majorité de… copies ! Certes, on ne saurait se réjouir de cette initiative, ni la cautionner, rien ne remplaçant le contact avec les originaux. Mais s’agissant de diplomatie, une réplique de la Liberté ne ferait-elle pas illusion ? Lorsque les médias ont révélé que le griffon restitué par les États-Unis était en réalité un faux, un responsable iranien aurait déclaré : « À cheval donné, on ne regarde pas la denture ! » En politique, les symboles valent souvent mieux que les œuvres.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°665 du 1 février 2014, avec le titre suivant : Etude, A étudier

Tous les articles dans Opinion

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque