Comment résumer, en un album, une collection qui compte près de 290 000 pièces provenant des quatre coins du monde extra-européen ?
Pour résoudre cette délicate équation, le Musée du quai Branly, à Paris, a opéré un choix drastique parmi les œuvres qu’il conserve, selon des préoccupations avant tout didactiques. L’ouvrage aujourd’hui édité chez Flammarion Skira ne résulte pas de choix esthétiques décidant des chefs-d’œuvre de l’institution, non plus qu’il ne reflète le parcours permanent du musée, comme le précise Yves Le Fur, qui a dirigé la publication. Directeur du patrimoine et des collections du Musée du quai Branly, celui-ci a, avec l’aide d’un comité scientifique, retenu les objets « significatifs de ce que la culture de l’honnête homme pouvait apprendre et comprendre dans le domaine des expressions extra-européennes ». Cette sélection se résume à six grands chapitres se rapportant aux quatre continents (l’Afrique, l’Océanie, les Amériques et l’Asie) d’où proviennent les œuvres, au fonds photographique et aux collections historiques – tableaux, mobilier et œuvres graphiques. Chaque partie réunit un panel d’une quarantaine de pièces précédé d’une introduction historique. Pour pallier le risque d’un discours unique sur l’objet, Yves le Fur a fait appel à cent cinquante spécialistes internationaux, chercheurs, historiens de l’art, conservateurs, anthropologues, ethnologues, philosophes ou experts, chacun mettant l’accent sur les particularités de sa discipline. « Au lieu d’un abrégé d’histoire de l’art premier, émerge une collection d’œuvres représentatives de la fluidité qui commande l’histoire des rapports entre les hommes et les événements », précise Yves Le Fur. Les reproductions, de qualité, donnent à voir une grande variété d’œuvres (sculptures, textiles, bronzes, céramiques, ivoires, bijoux, armes), comme cette Statue anthropomorphe, chef-d’œuvre de l’art dogon du Xe-XIe siècle ; ce costume de chaman sibérien, dont chaque élément joue un rôle pour établir le contact avec les esprits ; ou encore cette figurine de Manabí représentative de la Culture de la côte nord de l’Équateur entre le VIe siècle avant notre ère et le VIe après J.-C. En annexe, le lecteur dispose d’un schéma sur l’histoire des institutions françaises ayant eu la garde des collections, et d’une carte géographique fournissant des repères concrets quant aux sites originels des pièces. Seul regret, ce bel ouvrage n’aborde pas la délicate question de la restitution des œuvres, pourtant au cœur des débats muséaux actuels. Parallèlement à son travail de conservation, le Musée du quai Branly a développé des activités d’éditeur et repris à son compte, en 2005, la publication de Gradhiva, fondée en 1986 par Michel Leiris et Jean Jamin. Le nouveau numéro de cette revue culte s’interroge sur l’art des enfants comme possible reflet de l’enfance de l’art… Devenu une catégorie isolée et centrée autour de notions purement pédagogiques, l’art des enfants a été, au début du siècle dernier, le domaine de rencontres entre création esthétique et réflexion anthropologique.
MUSÉE DU QUAI BRANLY. LA COLLECTION, Yves Le Fur (sous la dir. de), éd. Skira Flammarion, 480 p., 55 euros, ISBN 978-2-0812-0876-6.
GRADHIVA, no 9, éd. Musée du quai Branly, 2009, 208 p., 22 euros, ISBN 978-2-35744-009-8.
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Yves Le Fur (sous la dir. de) : "Musée du Quai Branly. La Collection"
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°310 du 2 octobre 2009, avec le titre suivant : Yves Le Fur (sous la dir. de) : "Musée du Quai Branly. La Collection"