Pour le bonheur des historiens de l’art et des amateurs, les éditeurs multiplient les ouvrages de synthèse. L’Histoire de l’art publiée par Flammarion – dont vient de paraître le volume sur l’époque contemporaine – semble offrir les meilleures garanties.
Après trente ans d’érudition à la manière positiviste, qui ont vu se multiplier recherches d’archives, attributions d’œuvres et catalogues d’artistes, après trois décennies au cours desquelles se sont accumulés ouvrages et articles sur les sujets les plus pointus, après cette période qui a vu des millions de visiteurs acheter pieusement, à l’issue des expositions de la Réunion des musées nationaux, d’énormes catalogues remplis de rébarbatives notices à peine égayées de méchantes photographies en noir et blanc, voici revenu le temps des synthèses en histoire de l’art. Comme si l’on éprouvait désormais le besoin de maîtriser l’énorme masse d’informations accumulées par une génération de travaux savants.
Dans le fond, les sciences, humaines ou pas, progressent selon une démarche cyclique qui fait alterner recherches et conclusions. Étant entendu qu’il est d’autant plus difficile de conclure que les recherches ont été fécondes : la fabrication des grandes Histoires de l’art au début du siècle, ou même dans les années soixante, n’était que jeu d’enfant auprès de celles que l’on produit aujourd’hui.
Telle est probablement l’une des principales raisons pour lesquelles on a tant attendu pour le faire. Mais aujourd’hui qu’un véritable marché se fait jour en raison des demandes des lycéens, des étudiants et du public cultivé, voici que les éditeurs, avec le courageux panurgisme qui les caractérise en France, multiplient les projets. Parmi lesquels le plus avancé, celui qui offre les meilleures garanties scientifiques semble être l’Histoire de l’art des éditions Flammarion : vient de paraître le volume sur l’époque contemporaine (XIXe-XXe siècle), dont Françoise Hamon et Philippe Dagen ont assuré la direction.
Concevoir une synthèse n’est pas facile : il faut découvrir le point de vue élevé d’où l’on pourra embrasser le panorama le plus étendu – en l’espèce, l’Europe, à laquelle s’ajoutent progressivement les États-Unis et le Japon – et s’y tenir ; faire des choix lucides et courageux, braquer le projecteur ou laisser dans l’ombre ; disposer d’une illustration adéquate.
Les auteurs, soucieux de traiter les différents types de production artistique – architecture, peinture, sculpture, mobilier et photographie –, confrontés de surcroît à deux siècles particulièrement complexes, ont adopté à juste titre un parti chronologique et périodisé, comme on dit en jargon du métier, en cinq phases : les romantismes ; révolutions et réactions, l’âge des avant-gardes ; ordres et désordres ; triomphe et crise de la modernité. Le propos est simple, ne s’embarrasse pas de théories alambiquées, cherche à éviter les pièges du nominalisme (romantisme contre néo-classicisme par exemple), et se livre à un véritable effort historique, curieusement assez rare en histoire de l’art, pour mettre en évidence les synchronismes.
À l’appui du discours, une illustration abondante, toujours en couleurs pour les arts plastiques, mise en rapport avec le texte, originale et bien légendée.
Un seul regret : le parti adopté d’une bibliographie trop sommaire. Plus abondante et mieux organisée, elle eût permis de rendre compte de l’activité de la recherche, des problèmes posés, des zones d’ombre à éclaircir. Mais c’est un regret mineur au regard du résultat obtenu : un incontournable outil de travail pour l’étudiant, un indispensable objet de satisfaction pour le public cultivé.
Sous la direction de Françoise Hamon et Philippe Dagen, Histoire de l’art. Époque contemporaine. XIXe- XXe siècle, Éditions Flammarion, 575 p., 395 F.
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Une nouvelle histoire de l’art : des années d’analyse pour une heure de synthèse
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°21 du 1 janvier 1996, avec le titre suivant : Une nouvelle histoire de l’art : des années d’analyse pour une heure de synthèse