Ne pensez pas que son titre se réfère à une quelconque lecture de notre époque : Trouble, revue née en 2002 et dont le deuxième numéro sort à l’automne, ne renvoie pas à l’éventuel chaos, intellectuel ou conceptuel, voire politique, qui pourrait bien être à l’œuvre dans notre société. Non, Trouble traduit en fait le parti pris exigeant de ses quatre jeunes (entre 25 et 35 ans) fondateurs, Boris Achour, artiste, François Piron, commissaire d’exposition, Claire Jacquet, chargée d’expositions au Centre national de la Photographie et Emilie Renard, qui travaille au Palais de Tokyo. « Le nom nous semblait convenir à une enveloppe dont nous ne voulions pas déterminer à l’avance le contenu, au refus d’un positionnement idéologique ou d’une appartenance à une école, voire à une génération. Restons dans le flou. » Un flou qui a cependant les idées très claires et quelques principes bien définis. Quant à la méthode de travail, d’abord. Pas question d’établir un comité de rédaction, de peur de créer une famille de pensée ou une logique de groupe. Les auteurs changeront donc à chaque numéro, au gré du choix des sujets qui ne doivent pas se limiter aux arts plastiques. L’accent est mis ensuite sur la forme des textes et leur qualité d’écriture, une ambition littéraire qui a conduit les pages de Trouble à accueillir des écrits d’artistes ou d’écrivains. Le contenu, enfin, s’agence autour d’un sommaire construit, et si le premier numéro trouvait sa cohérence autour de l’idée d’économie, le deuxième s’attaquera à la notion d’entretien dans le domaine de l’art. Bref, Trouble récuse tout lien d’inféodation à l’actualité, au rythme journalistique et au point de vue scientifique de l’historien de l’art. Trouble n’est pas non plus une entreprise commerciale. Si le premier numéro a obtenu deux aides exceptionnelles – de l’Adiaf, Association de diffusion internationale de l’art français, un regroupement de collectionneurs privés, et de la Délégation aux Arts plastiques – le deuxième s’autofinancera. Une gageure lorsqu’on pose aussi pour principe (assez rare pour être souligné) de payer les auteurs. « Il était pour nous impensable de ne pas le faire, explique François Piron, parce qu’il s’agit de redistribuer les pouvoirs, et principalement le pouvoir monétaire ». Résultat : les 1 500 exemplaires du n°1 ont tous été vendus. Produire et diffuser des textes de l’art sur l’art, voilà au fond une attitude très à contre-courant de l’époque. Trouble est peut-être une revue qui ne se situe pas, mais qui existe. Empirique, intuitive. Au présent.
- Trouble, ed.Trouble-La revue, 160 p. 9 euros
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Trouble
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°539 du 1 septembre 2002, avec le titre suivant : Trouble