Pour Adel Abdessemed, dans son entretien avec Pier Luigi Tazzi (Actes Sud, 116 p., 19,90 €), « une œuvre n’existe pas si elle n’est pas autobiographique ».
Certes. Encore faut-il qu’elle ne débouche pas sur un art exclusif, fait par et pour soi. « Un jour, j’ai téléphoné à ma mère et je lui ai demandé quand elle viendrait me rendre visite en France. Elle m’a répondu qu’elle ne pouvait pas me parler longtemps, car elle faisait des boureks et qu’ils risquaient d’être brûlés […]. À ce moment-là, j’ai eu l’idée de faire Bourek, d’aplatir un avion comme une feuille de papier. »
On est loin, ici, de Joseph Beuys qui, tout en puisant dans son histoire personnelle, poussait le spectateur à s’engager, mobilisait la conscience tout autant que l’inconscience. Et lorsque la référence à soi laisse place à une autre dimension, c’est pour lire le commentaire de Pier Luigi Tazzi sur le travail d’Adel Abdessemed : « Dans ton cas, comme dans le cas des autres artistes de la même génération, il n’y a pas un trait stylistique reconnaissable, mais plutôt une même disponibilité à l’usage des instruments rendus accessibles par l’évolution technologique… » En regardant Décor, ces christs en barbelés crucifiés présentés cet été à Colmar, on ne peut pas s’empêcher de penser à Wim Delvoye.
D’autres fois, au cours de l’entretien, le propos force le poids de l’œuvre en faisant un medley des meilleures intentions : « Une main blanche verse du lait sur le corps noir d’Ibou Tal […]. Zen évoque le problème du racisme et de l’identité dans une ville […] où il y a aussi le tourisme, le sexe, la drogue, l’exil et l’immigration, les clandestins, les crimes et la censure […]. Zen signifie la vie de notre temps avec un mélange de tendresse, de lait, de verdure, de souffle, de colère d’un homme debout imprégné de calme. » Adel Abdessemed rejoint Gerhard Richter qui déclarait : « C’est très difficile, voire oiseux, de parler de la peinture. On ne peut rendre par les mots ce qu’on appréhende par les mots avec les capacités du langage », lorsque lui-même affirme : « Quand je ne sais pas dire quelque chose, c’est là que j’ai envie de parler dans ce langage qui est le mien : les images. » Mais tandis qu’un tableau comme Uncle Rudi de Richter interroge les ambiguïtés du visible et le rapport à l’histoire, Chemins qui ne mènent nulle part laisse l’arrière-goût de la velléité.
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L’universalité selon Adel Abdessemed
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°651 du 1 novembre 2012, avec le titre suivant : L’universalité selon Adel Abdessemed