La mise en rapport du texte et de l’image est l’un des procédés classiques de l’histoire de l’art, et l’exercice auquel se prête Romain Goupil dans son film documentaire Courbet, les origines de son monde. Réalisé à l’occasion de la rétrospective de l’artiste qui s’ouvre le 17 octobre au Grand Palais, il est diffusé sur Arte le 19 octobre.
Le film se construit comme un dialogue à deux niveaux. Le premier tresse trois voix entre elles : celle de Courbet, de ses contemporains critiques et d’une narratrice. Le second fait converser ces voix et des plans fixes d’une belle sobriété. La démarche du documentaire s’apparente à celle de Courbet comme « peintre du vrai » et se concentre sur la dimension physique de l’œuvre, filmant au plus près les toiles. Le documentaire montre la trame et la matière, mais aussi les paysages représentés par l’artiste.
Le choix des lettres de Courbet adressées à ses parents et à son mécène Alfred Bruyas, lues par Romain Goupil, dessine le portrait d’un jeune homme sûr de sa destinée, volontiers vaniteux, mais néanmoins indéfectiblement attaché à ses racines franc-comtoises et à son village natal d’Ornans. Ornans, vers lequel Courbet revient toujours, pour y peindre les œuvres de la controverse et de la renommée, L’Après-dîner à Ornans (1849) et L’Enterrement à Ornans (1850). Les textes critiques lus par Hippolyte Girardot rappellent le scandale que ces peintures provoquèrent. Parfois élogieux, souvent virulent, leur ton assassin fait sourire le téléspectateur du XXIe siècle, qui n’est plus habitué à une telle violence de la presse. Les lettres de Courbet le montrent cependant ravi des attaques, dans lesquelles il lit la marque de son indéniable importance.
Apportant la dimension du recul historique, la voix de la narratrice, Valeria Bruni-Tedeschi, est le fil rouge du dialogue indirect entre Courbet, ses rares admirateurs et ses nombreux détracteurs. Elle se fait plus présente à mesure que le peintre vieillit et qu’il connaît, après l’effervescence de la Commune et de ses hautes fonctions dans le gouvernement – comme celle de président de la Commission des arts –, la solitude de l’emprisonnement et l’angoissante approche de la mort. Le film relaye aussi les thématiques choisies par les commissaires de l’exposition « Gustave Courbet » au Grand Palais, en privilégiant comme clés de lecture la fidélité aux racines familiales, l’intérêt pour la question du paysage et les scènes de chasse ; ou le lien entre la nature mélancolique des dernières natures mortes et les déboires politiques de l’artiste.
Arte édite également en DVD Gustave Courbet, dans la collection Artistes, avec le film de Romain Goupil et en bonus Courbet, l’origine du monde, film de Jean-Paul Fargier, 24 euros.
Gustave Courbet, les origines de son monde, film diffusé sur Arte le 19 octobre à 22h15, 2007, 52 minutes, coproduction Les Poissons volants-Arte France-Réunion des musées nationaux.
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« Les origines de son monde »
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°266 du 5 octobre 2007, avec le titre suivant : « Les origines de son monde »