Le Livre des peintres de Karel Van Mander (1548-1606), artiste hollandais du XVIe siècle, relate la vie des plus grands peintres des Pays-Bas et de l’Allemagne, de Dürer à Memling, en passant par Holbein et Metsys. Longtemps dénigré, cet ouvrage constitue une véritable source d’informations désormais essentielle pour l’historien d’art.
Version nordique des Vies de Vasari, Le Livre des peintres (Schilder-boeck) de Karel Van Mander, a été publié en 1604 à Harleem. De passage à Florence en 1573, il avait rencontré Vasari qui travaillait alors au décor de la coupole de Santa Maria del Fiore et avait déjà certainement acheté la deuxième édition des Vies – celle de 1568 – qui, à la différence de la première (1550), évoquait la vie de nombreux artistes contemporains. “De plus, jusqu’à notre temps, je mentionnerai, autant que faire se pourra, les nobles artisans, les hommes de génie qui ont contribué au progrès de l’art”, écrit Van Mander dans son avant-propos. Cette notion de “progrès de l’art” semble reprendre la “loi des trois états” de Vasari, qui suppose que l’art s’accomplit selon un cheminement progressif vers une perfection incarnée par Michel-Ange. Si Van Mander se place résolument dans la lignée de Vasari, il n’entend pourtant pas glorifier quelque zone géographique comme l’avait fait ce dernier avec Florence, qui s’inscrivait selon lui en frontispice d’une histoire présentée comme celle de tous les arts. Après avoir évoqué les maîtres du passé tels les frères Jan et Hubert Van Eyck, Hans “Memmelinck” et bien d’autres, il aborde l’œuvre de ses contemporains comme Pieter Bruegel, Martin Heemskerck, Hendrick Goltzius ou encore Antoine de Montfort. Le but premier de Van Mander était de révéler au public les maîtres nordiques, à la suite de son maître Lucas de Heere qui les avait déjà chantés en poème. Mais Van Mander entend accomplir avant tout un devoir de mémoire collective lorsqu’il écrit dans son avant-propos : “Toutefois, tenons pour certain que les noms, la vie et les travaux des glorieux représentants de notre art, seront d’autant plus sûrement transmis à nos descendants [...] qu’une relation fidèle viendra les rappeler sans cesse et les soustraire à l’action destructive du temps, dont la bêche aurait bientôt fait de les ensevelir dans la fosse de l’oubli.” Les citations de Pline et les références aux Adages d’Érasme comme modèle humaniste ponctuent l’ouvrage, ainsi que le souci de vérité historique souligné par l’évocation des campagnes iconoclastes. La plupart des biographies s’achèvent sur un poème tiré des Effigies des peintres néerlandais célèbres publié en 1571 par Domenicus Lampsonius. Van Mander, au-delà des anecdotes – comme la façon dont Jean Van Eyck a découvert la peinture à l’huile –, nous livre d’importantes informations sur les différents mécènes, qu’ils soient privés ou publics. Ainsi, nous assistons à la rencontre entre Holbein et Henri VIII au cours d’un banquet. La biographie de chaque peintre est accompagnée d’une notice qui précise la localisation actuelle des œuvres. Le second volume à paraître traitera d’artistes tels que Lucas de Heere, Martin de Vos.
- Karel Van Mander, Le Livre des peintres (1604), Paris, Les Belles Lettres, 2001, 286 p., 130 F, ISNB 2-251-44186-7. À paraître tome 2.
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Le Vasari flamand
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°129 du 8 juin 2001, avec le titre suivant : Le Vasari flamand