Le temps retrouvé de Nélie Jacquemart

Mais Nélie Jacquemart n’est pas connue pour avoir été une muse. Forte d’un caractère bien trempé, cette amoureuse des arts et de l’Italie, dont elle ramena une splendide fresque de Tiepolo qui orne toujours l’escalier du Musée Jacquemart-André, fut peintre, collectionneuse, chef d’entreprise et philanthrope. Elle est aujourd’hui connue de tous les amateurs d’art pour avoir légué à l’Institut de France, à sa mort en 1912, deux extraordinaires demeures renfermant un grand nombre de chefs-d’œuvre : l’hôtel particulier parisien du boulevard Haussmann, devenu le Musée Jacquemart-André, et l’abbaye de Chaalis dans l’Oise, non loin de Chantilly. Pourtant, d’elle, on sait bien moins de choses que de son époux, Édouard André, richissime héritier avec qui elle partageait le goût pour l’art et son histoire, et auquel elle survécut dix-huit ans. Précise, riche, très documentée, sans fioritures, cette première biographie de Nélie Jacquemart retrace enfin le parcours trépidant de cette femme issue d’un milieu modeste qui, sous la protection de madame de Vatry, alors propriétaire de l’abbaye de Chaalis, sut s’imposer dans un monde de l’art alors presque exclusivement masculin, jusqu’à devenir une portraitiste reconnue, côtoyer les plus hautes sphères sociales de la Belle Époque et constituer avec son époux la collection d’un des plus beaux musées privés de France. Un ouvrage de référence pour les férus d’art, qui consolera peut-être les amoureux du Musée Jacquemart-André de la fermeture du lieu pour travaux, jusqu’en septembre 2024.